ANAPI

Van Coillie Dries – J’ai subi le lavage de cerveau

Lavage de cerveau en Chine :

J’ai subi le lavage de cerveau

Dries Van Coillie, Mobilisation des consciences, Bruxelles, 1964

Le terrible témoignage d’un prêtre emprisonné pendant trois ans dans les geôles maoïstes. L’auteur y décrit abondamment les méthodes de lavage de cerveau employées par les gardes rouges.

Préface de Gabriel Marcel de l’Académie des sciences morales et politiques:
« Ce livre constitue un nouveau témoignage — et non un des moins accablants — sur les méthodes mises en œuvre dans les pays communistes pour extorquer à ceux que l’on considère comme les ennemis du régime les faux aveux par lesquels, bien loin de se « libérer », ils se trouveront réduits à la condition d’esclaves et de complices.

Je me suis souvent exprimé — en particulier dans mon étude sur les Techniques d’Avilissement — sur le crime de lèse-humanité que constituent de tels procédés. Et peut-être n’aurais-je pas consenti à exprimer une fois encore, dans un contexte à peine renouvelé, l’indignation que ce crime éveille en moi, si la reconnaissance du gouvernement de Pékin par la France ne créait pas pour nous une situation très délicate à laquelle il faut prendre garde.

Sur l’opportunité de cette reconnaissance, je n’ai pas à me prononcer ici. J’ai d’ailleurs refusé de signer une protestation à laquelle on m’avait demandé de m’associer. Ceci ne veut pas dire que j’approuve, mais plutôt que je ne me sens pas qualifié pour émettre une opinion vraiment motivée sur un acte purement politique comme celui-là. En revanche, j’éprouve le besoin de dénoncer la campagne qui déjà s’amorce en France pour réhabiliter plus ou moins explicitement ceux qui se sont rendus coupables des forfaits que j’ai dits.
Plus ou moins explicitement, je le répète : en fait ceux qui, pour des motifs souvent inavouables, s’efforcent de manipuler une opinion publique dont la ductilité n’est plus à démontrer, procèdent de façon indirecte; plutôt que de s’attaquer de front à l’obstacle, ils s’efforcent de le tourner. Ils trouvent un appui dans l’incroyable faculté d’amnésie qui est sans doute une conséquence de la surcharge à laquelle les événements ont soumis les esprits depuis un certain nombre d’années.

Et n’omettons pas non plus le rôle néfaste que joue ici un certain snobisme entretenu par le spectacle. Dans ces conditions, la vigilance s’impose : nous avons à lutter en nous-mêmes contre tout ce qui nous invite à la distraction et au sommeil. Il est possible, je n’en disconviens pas, que nous ayons intérêt à développer avec la Chine des relations commerciales et que notre industrie trouve là un débouché précieux, — bien qu’on voie assez mal en vérité quelle pourra être la contrepartie de ce que nous lui fournirons.( Ce texte date 1964. Note du Scrutateur ).

On peut admettre aussi à la rigueur que, sur le plan de la science et de la technique, une certaine coopération puisse être instituée. Mais une ligne de démarcation précise devrait être tracée entre ce domaine et celui de la pensée proprement dite qui se renie, qui se suicide, si elle ne maintient pas coûte que coûte le caractère imprescriptible de certaines valeurs.
Et je vise ici aussi bien la vérité que la justice dont l’histoire, à la lumière de la réflexion, nous montre qu’elles sont étroitement solidaires. D’autre part, il est une illusion dont nous avons à nous défendre : c’est celle qui consisterait à s’imaginer que les procédés odieux qui sont décrits dans ce livre sont réservés à des peuples peu évolués et que nous ne risquons pas de les voir appliquer un jour chez nous. C’est là un non-sens, ne serait-ce que parce que les Chinois ont derrière eux des siècles, presque des millénaires de civilisation qui ne le cèdent en rien à l’héritage dont nous nous enorgueillissons nous-mêmes. Dès lors, nous avons à nous garder d’une présomption aveuglante qui ne peut en fait que frayer la voie à la subversion.

Je me référerai ici très précisément à un passage de l’ouvrage qui m’a particulièrement frappé.
Le Père Van Coillie venait de subir toutes sortes de sévices sur lesquels je ne m’étendrai pas… Il est soudain mis en présence d’un homme jeune qui porte des vêtements civils et qui lui témoigne une sympathie surprenante. « Comme tu as été maltraité!
Quel triste aspect te donnent ces menottes, ces chaînes, cette chemise déchirée, ce visage noir de saleté! » En présence de cette compassion, le malheureux se sent soudain fondre de reconnaissance. La conversation s’engage. Mais d’abord l’autre s’inquiète de savoir s’il n’a pas soif. Sur sa réponse affirmative, il prend un verre et le remplit de thé chaud.

Il explique alors que son père était diplomate, que lui-même a été attaché d’ambassade à Tokyo, puis à Paris où il a découvert la philosophie d’Auguste Comte, à laquelle il a d’abord adhéré avec ardeur. Aux Etats-Unis, il a succombé à une sorte de nihilisme, mais l’étude du marxisme l’a libéré : depuis qu’il a rencontré le communisme, il est heureux. Pourquoi Van Coillie ne suivrait-il pas son exemple?

Lui-même est tout prêt à l’aider. Pour cela, il faut d’abord qu’il se mette en règle. Van Coillie a déjà avoué au juge qu’il avait aidé des étudiants à quitter le territoire de la Chine communiste et qu’il a créé une petite organisation pour favoriser d’autres départs. N’y a-t-il pas là une base suffisante pour les aveux exigés? « Non, déclare l’autre, il faut que nous cherchions du côté « renseignements d’espionnage ». Ne t’inquiète pas, Van Coillie, tu vas simplement répondre à mes questions… As-tu parfois envoyé des lettres à l’étranger? — Oui. — Même après la prise du pouvoir par les communistes? — Oui. — Dans ces lettres, parlais-tu du communisme, de la situation nouvelle de la Chine? — Oui.— Explique-moi concrètement ce que tu as écrit, donne-moi un exemple. » Van Coillie se creuse la tête, non pour se rappeler ce qu’il a écrit, mais pour inventer quelque chose de plausible. « J’ai écrit qu’en février 1949 la 8ème Armée communiste est entrée dans Pékin ». L’homme ne put cacher son contentement. « Parfait, nous allons maintenant analyser cette information ».

D’une part, elle est militaire; d’autre part, Van Coillie l’a envoyée à des membres de sa famille, qui l’ont certainement transmise à d’autres personnes, à des amis, à des voisins. Il y a tout lieu de supposer que l’information est parvenue au gouvernement de Bruxelles. Or, celui-ci est réactionnaire. «Je résume : tu as envoyé des informations militaires à un gouvernement réactionnaire, donc ennemi du peuple.

Mais qui accomplit de telles aides, sinon un espion? ; Tu es donc un espion et même, ajoutons-le, un espion international ». Le tour est joué. On voit donc comment, sans qu’il soit le moins du monde nécessaire de faire appel à une drogue ou à un « traitement », en jouant seulement sur la fatigue et la dépression et sur l’espèce de réconfort illusoire créé par un témoignage de sympathie (!), on arrive à obtenir exactement ce que l’on cherche. Mais, à partir du moment où le malheureux a collé sur lui-même l’étiquette d’espion international », il est à la merci de son bourreau, il ne peut plus compter que sur sa clémence et il est comme d’avance prêt à dire ou même à faire n’importe quoi pour se la concilier.

Qu’un régime où de telles méthodes sont employées ose se qualifier lui-même de démocratie, c’est là une impudence qui confond.
La première utilité d’un ouvrage comme celui-ci est d’empêcher les esprits justes de s’y laisser prendre. Mais d’autres leçons s’en dégagent qu’il importe de résumer brièvement.
” J’ai dit ailleurs (dans Les Hommes contre l’Humain notamment) à quel point les techniques d’avilissement et de manipulation des consciences ont pris pied dans le monde où nous sommes nous-mêmes. L’habileté des méthodes et leur « humanité » apparente ne peuvent nous aveugler sur leur nature. On ne saurait assez réfléchir au pouvoir de séduction et de corruption des fanatismes, des propagandes tentaculaires, de la radio, de la télévision, de la presse à sensation, etc, sur une opinion dont personne ne peut plus douter aujourd’hui qu’elle soit ce qu’il y a de plus malléable au monde. Et on ne peut manquer aucune occasion de rappeler que les sciences et les techniques ne deviendront entièrement respectueuses de la dignité et de la liberté humaines et entièrement bienfaisantes que si elles échappent aux égoïsmes individuels et étatiques pour se mettre au service d’une activité spirituelle orientée vers des fins supérieures. Peut-on douter qu’à, défaut l’homme risque d’être traité de plus en plus comme un simple matériel que l’on façonne, que l’on « conditionne » pour satisfaire, selon les cas, la cupidité ou la volonté de puissance?

Mieux vaut sans doute ne point évoquer trop concrètement ici certaines méthodes policières, très répandues semble-t-il dans le monde libre, qui sont bien proches des procédés évoqués dans cet ouvrage. Plusieurs nations, par l’intensité même de leurs divergences, semblent s’acheminer vers des situations troubles où, sans aucun doute, ces méthodes seraient appliquées sur une grande échelle.
Je ne puis m’étendre sur ce sujet car je veux dire un mot du livre lui-même, et avant tout pour signaler la charité qui l’imprègne.

Après sa libération, l’auteur de cet ouvrage rencontre un jour le Père Ulrich Lebrun, qui eut l’infortune de subir successivement les sévices de Buchenwald et celles de Pékin. Dries Van Coillie lui pose la question : — Où avez vous souffert le plus cruellement? A Buchenwald ou à Pékin? La réponse est nette : Je préfère dix ans de Buchenwald à un an de Pékin! Et d’expliquer qu’à Buchenwald, après les pires tourments, il se retrempait dans la chaude et virile amitié des autres prisonniers. Tandis qu’à Pékin, il subissait les incessantes attaques, veules et haineuses, de ses frères de malheur. Et la haine de ceux qui trahissent est la plus difficile à supporter.

Et cependant, ce livre est d’une sérénité remarquable. Visiblement, l’auteur aime le peuple chinois avec une prédilection que son long martyre n’a pu entamer. Il dit ce qu’il a subi, sans engager aucune polémique, sans proférer aucune inventive. Il plaint les victimes, devenues ses bourreaux. Cela ne fait aucun doute: s’il dénonce ces méthodes inhumaines à la « conscience universelle », c’est pour qu’elles cessent. QUI POURRAIT DIRE QUE CET EFFORT NE SOIT PAS OPPORTUN?

La version française mérite des louanges. Le tour en est vif, alerte, direct. La langue est précise et pure. Au fond des geôles de Mao Tsé-Tung, l’auteur n’avait point perdu l’humour calme et souriant qui suppose la maîtrise de soi.

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Vollaire Jacques – Deux ans de KA NHA

Blessé dans la citadelle de Dong Khé, le 18 septembre 1950, le capitaine Jacques Vollaire du II/3e REI est capturé et interné dans les camps Vietminh.

Mais le capitaine Vollaire possède un extraordinaire don d’observation doublé d’un réel talent de caricaturiste. Deux années durant, armé d’un crayon et de papier “bambou”, Jacques Vollaire va croquer sur le vif ses camarades de captivité du Camp n° 1. Le papier est pourtant une denrée rare, très recherché des fumeurs… il parvient, malgré le climat particulièrement humide et les conditions propres à la captivité, à préserver ses précieux dessins tout au long de son “séjour”.

En août 1952, bénéficiant de la “clémence de l’oncle Hô”, Jacques Vollaire est libéré. De retour en Métropole il rassemble dessins et caricatures et décide de les mettre en forme pour réaliser un ouvrage qu’il publie à compte d’auteur en 1953.

L’ouvrage, tiré à un très petit nombre d’exemplaires, est avant tout un hommage à ses camarades encore en captivité, la plupart ne seront libérés qu’en septembre 1954, mais il est aussi destiné aux familles des prisonniers, leur donnant ainsi de précieuses indications sur les conditions de vie au Camp n° 1. évoquer la captivité au travers d’illustrations humoristiques était assurément un parti pris surprenant pour l’époque. Il faut savoir que 70 % des captifs ont péri dans les camps Vietminh, les rares rescapés sont revenus brisés par la malnutrition, les maladies et les épreuves subies, pour certains, durant quatre longues années.

C’est à la demande de nombreux anciens, et bien sûr d’anciens du Camp n°1, que le projet de rééditer cet album a vu le jour, mais c’était aussi le désir de rendre accessible à tous cet ouvrage, à l’origine “confidentiel”, devenu tout à fait introuvable de nos jours…

Ce premier album ouvre la collection « fac-similé » de documents qui méritent d’être à nouveau disponibles pour les passionnés de cette période de notre Histoire.

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21 et 22 Mai 2015 28e Congrès National de l’ANAPI à Chalon sur Saône

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Participation de l’ANAPI aux cérémonies commémoratives des 100 ans de la Chapelle de That Khé

Cérémonie fêtant sa restauration les 6 et 7 octobre 2015.

Une délégation de l’ANAPI conduite par Mr Jean DOORNBOS, membre du Bureau Fédéral de l’Association, s’est rendue au Vietnam, du 4 au 15 octobre 2015 pour participer aux cérémonies religieuses et festives destinées à commémorer les 100 ans de la chapelle de That Khé et l’achèvement de sa restauration.

Cette délégation dont chaque membre portait sur sa veste ou sa chemise, un petit drapeau français, était l’invitée particulière de Monseigneur Joseph DANG DUC NGAN, évêque de Lang Son – Cao Bang et du père TOMA AQ NGO VAN KHAO, curé de la paroisse de That Khé.

A travers elle, ce sont diverses associations françaises, en particulier VIETNAM-ESPERANCE et l’ANAPI, et nombre de particuliers que ces autorités religieuses ont tenu à remercier pour leurs dons généreux sans lesquels la restauration de la chapelle n’eût pas été possible.

La délégation fût accueillie dans des conditions remarquables et, à tout moment des festivités, particulièrement mis à l’honneur.

Le 6 octobre, après un dîner au cours duquel le père KHAO fit la connaissance de chacun tout e faisant montre de la plus grande amabilité, la délégation fut invitée à assister, au premier rang, à un spectacle de danses et de chants religieux vietnamiens d’une qualité exceptionnelle.

Près de 2500 habitants de That Khé et des bourgs environnants se pressaient autour de la scène pour, dans une ambiance gaie et bon-enfant, applaudir ces magnifiques prestations.

Le 7 octobre, après un petit-déjeuner offert par la paroisse et l’accueil de différentes personnalités par le père KHAO, dont Monseigneur Joseph DANG, la chapelle fut officiellement inaugurée en grande pompe.

Une procession dans les rues de That Khé s’ensuivit. Une fanfare en grand uniforme précédait des religieuses et une cinquantaine de novices toutes de blanc vêtues. Puis, la statue de la Vierge du Rosaire, offerte par l’ANAPI, revêtue d’un grand manteau de pourpre et d’or, couronnée d’un diadème d’argent, était portée par sept hommes sur un palanquin dont les montants et la partie supérieure étaient recouverts de dorures.

Derrière la Vierge, une quarantaine de prêtres en aube jaune pâle précédaient leur évêque avançant majestueux, coiffé de sa mitre et armé de sa crosse. La délégation de l’ANAPI et une foule bigarrée de vietnamiens fermaient cet impressionnant cortège.

La procession s’est achevée dans l’église ou une grand-messe de deux heures et demie fut présidée par Monseigneur DANG. Couronnement de cette cérémonie, l’ordination d’un jeune prêtre du diocèse. Au cours de cette grand-messe, Jean DOORNBOS fut invité à prononcer une allocution. Il le fit en vietnamien puis en français, sous les applaudissements et les réactions enjouées de la foule. La délégation entonna aussi un “Ave Maria” qui fut accompagné par l’orchestre et repris par ceux des vietnamiens, nombreux, qui la connaissaient.

Enfin, la délégation s’avança dans la nef et remit à l’évêque, au père KHAO et au jeune prêtre nouvellement ordonné, trois magnifiques bouquets de fleurs. Puis Jean DOORNBOS offrit officiellement la Vierge du Rosaire au curé de That Khé pour qu’il la place dan sla chapelle.

Un banquet copieux servi pour 2500 convives acheva ces réjouissances. Jean DOORNBOS, la soeur SAÏ, dont le rôle comme interprète fut essentiel durant ces deux jours et un membre de la délégation furent invités d’honneur à la table de l’évêque et très aimablement accueillis par lui.

Dans l’après-midi, les délais n’ayant pas permis de procéder autrement, une magnifique statue de Saint Michel terrassant le dragon fut livrée au père KHAO. Autre cadeau de l’ANAPI, elle fut placée, elle aussi, dans la chapelle.

A l’issue du repas, la délégation, après avoir encore été invitée à partager un ultime verre de l’amitié, quittait les autorités religieuses et leurs sympathiques ouailles pour poursuivre son voyage mémoriel.

La chapelle de That Khé dans l’histoire de la Guerre d’Indochine

That Khé est une petite bourgade située sur la RC4, au Tonkin (Nord Vietnam) où se tenait, en 1950, une garnison française. Une chapelle y fut bâtie en 1915 qui servit longtemps de simple lieu de culte, à proximité de l’église paroissiale.

Après les sanglants combats de la RC4 (octobre 1950) qui anéantirent les colonnes “Le Page et Charton”, à l’occasion de l’évacuation de la place de Cao Bang, la chapelle recueillit quelques dizaines de rescapés blessés.

Ces malheureux combattants y furent capturés par les Viets après avoir pu bénéficier de quelques soins sommaires.  La chapelle de That Khé constitue donc l’un des derniers vestiges de cette tragique épopée et demeure, pour le rôle qu’elle a joué, dans le coeur des combattants qui y trouvèrent refuge et revinrent des camps Vietminh.

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Décès du commandant Jean Cornuault

Le commandant Jean Cornuault est décédé le 9 janvier 2016, à Phu Quoc (Vietnam), d’un arrêt cardiaque.

C’est un véritable héros et un grand serviteur qui nous a quittés. Officier de la Légion d’honneur, croix de guerre 1939-1945 (obtenue comme « SAS »), croix de guerre des T.O.E. (Indochine), croix de la valeur militaire (Algérie), 7 citations, médaille des évadés, 2 blessures de guerre‬, le commandant Cornuault s’était notamment illustré au Na-Khéo, durant la bataille de la RC4 (octobre 1950) comme chef de section au 1er BEP. Fait prisonnier à That Khé quelques jours plus tard, il avait subi 4 ans de captivité au camp n°1 (octobre 1950-septembre 1954). Il avait enchaîné avec la guerre d’Algérie‬ où il fut un ‪‎soldat‬ digne d’éloges.

En 1965, il quittait l’‪‎armée‬ pour commencer une carrière dans la ‪‎magistrature‬durant laquelle il eut notamment à instruire deux affaires demeurées célèbres : celle du Tupolev qui s’est écrasé au Bourget en 1973 et celle de ‪‎Mesrine‬ en 1979.

D’un courage exceptionnel, loyal et d’une rectitude morale digne des Preux, généreux au-delà du raisonnable, Il demeure à jamais dans le cœur de ceux qui l’ont connu. Nos pensées et/ou nos prières accompagnent le deuil de sa chère épouse, “Mado”.

Le commandant Cornuault avait récemment publié chez Indo-éditions, un ouvrage relatant sa passionnante existence : « Du sabre à la toge ».

Au revoir, Mon commandant…

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Voyage Mémoriel de la délégation de l’ANAPI (suite de l’article sur la chapelle de That Ké)

Les jours suivants furent essentiellement consacrés à un pèlerinage sur les lieux des hauts faits de la bataille de la RC4 : Dong Khé, Cao Bang, Bac Khan…

En particulier, la délégation s’est recueillie sur les tombes de soldats morts pour la France à Dông Mo. Elle a aussi déposé une gerbe de fleurs et honoré nos morts à Dong Khé.

A Hanoï, au célèbre pont Doumer qui relie les deux rives du fleuve Rouge, elle a déposé quelques fleurs et s’est recueillie en souvenir des victimes de la barbarie japonaise.

En outre, la délégation s’est rendue à l’école créée par l’ANAPI à Dong Khé puis à Phu Ôc où le curé lui a fait visiter la belle cathédrale dont la construction a été financée en partie par l’ANAPI.

La délégation est fière d’avoir dignement représenté l’ANAPI, les associations, les anciens combattants de l’Union française en Indochine qui ont tant aimé cette terre et, au-delà d’eux, la France entière. Elle conserve de ce magnifique périple un inoubliable souvenir.

Les membres des associations d’anciens d’Indochine tiennent à remercier particulièrement M. Amédée Thévenet, ancien sergent du bataillon de marche du 8e Régiment de Tirailleurs Marocains, blessé sur la RC4 en octobre 1950, recueilli, puis soigné dans la chapelle de That Khé et capturé par le Vietminh peu de temps après. Son action au profit du Vietnam en général et pour financer la rénovation de la chapelle de That Khé a été déterminante. Ces remerciements vont aussi à M. Thierry Servot dont l’action aux côtés de M. Thévenet mérite d’être louée.

Philippe TIMBANE

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Le “Monde” en parle : Déportés d’Indochine : soixante-dix ans d’oubli

Ancien avocat au barreau de Versailles, François Cartigny a lʼélégance de la France dʼantan qui porte blazer bleu marine à boutons dorés et termine ses correspondances par « Votre dévoué ».

Lʼhomme écrit. Beaucoup. Enormément. Ses courriers, documentés et précis, envoyés à lʼOffice national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), lʼaident à accomplir sa « Mission » – avec un grand M, insiste-t-il : honorer la mémoire des martyrs oubliés de la Résistance et de la déportation.
Le septuagénaire vient de remporter une victoire historique : deux soldats de lʼinfanterie coloniale, les Martiniquais Agnès-Albert Aly et Onésime Vernes, ont obtenu de la France, à titre posthume, la mention « Mort en déportation ». Leurs noms figurent au Journal officiel du 7 février. Ce sont les premiers à recevoir cet honneur national en étant décédés non pas dans un camp nazi, mais dans un camp japonais en Indochine, en 1945. « Il devrait y en avoir bientôt beaucoup dʼautres, convient Daniel Arnaud, chef du département reconnaissance et réparation à lʼONACVG.

Même si cela nʼest spécifié dans aucun document, lʼesprit de la loi Badinter du 15 mai 1985 qui a instauré cette dignité visait les hommes, les femmes et les enfants déportés sur le sol européen. Nos services ont dʼabord et surtout porté leurs efforts sur eux. »
La comptabilité inachevée de cette barbarie ignoble – on estime à 150 000 environ le nombre de personnes envoyées dans les camps à partir de la France et à 125 000 ceux qui y périrent – en témoigne : 78 498 mentions « Mort en déportation » avaient été attribuées au 4 mars.

Parmi elles, 78 496 sont des victimes du IIIe Reich et deux, désormais, dʼune autre puissance de lʼAxe, le Japon.


Une part dʼhistoire peu connue LʼIndochine de 1945 reste un théâtre dʼopérations méconnu. Les Français connaissent beaucoup mieux lʼhistoire du Débarquement et des plages de Normandie. A lʼécole, on apprend plutôt le conflit lié à la guerredʼindépendance de 1946 menée par le Vietminh contre la France et qui sʼacheva en 1954 après la défaite de Dien Bien Phu.

Qui se souvient en revanche des événements qui se déroulèrent sur ce territoirefrançais dʼAsie du Sud-Est au cours de la seconde guerre mondiale ?
Après lʼarmistice du 22 juin 1940, lʼamiral Jean Decoux est nommé gouverneur général de lʼIndochine française (Vietnam, Laos, Cambodge) par Pétain, président du Conseil depuis le 16 juin. Il applique la politique de Vichy et collabore avec les forces dʼoccupation japonaises. La « souveraineté française » est maintenue officiellement.

Mais le 9 mars 1945, alors que les Alliés sont proches de la victoire en Europe etque les Américains infligent de lourdes pertes aux Japonais dans le Pacifique, lʼempereur Hirohito ordonne à ses troupes de prendre le contrôle de lʼIndochine où vivent alors environ 40 000 Français, dont 18 000 militaires.


En moins de quarante-huit heures, 2 650 soldats français perdront la vie, tués au combat ou massacrés – décapités au sabre, enterrés vivants, achevés à la baïonnette. Des femmes seront violées devant leurs maris avant dʼêtre assassinées. Les survivants deviennent des captifs. Dans la population civile, 22 000 personnes sont placées en résidence surveillée. Environ 10 000 militaires, fonctionnaires et policiers connaissent lʼinternement impitoyable des camps disciplinaires. Près de 6 000 autres, dont 900 civils, soupçonnés dʼavoir résisté et comploté contre le Japon, sont envoyés en déportation, livrés à la merci de laKempetai, lʼélite de la police militaire, plus connue sous le nom de la « Gestapo Jap ».

Leur martyre ne sʼachèvera que le 2 septembre 1945, lors de la capitulation japonaise signée en rade de Tokyo à bord du croiseur américain USS-Missouri.


Un homme peut encore raconter aujourdʼhui la sauvagerie de la Kempetai, qui enfermait jusquʼà 20 prisonniers dans des cages en bois de 4 x 4 mètres, en principe réservées aux tigres.

Ce grand témoin de lʼHistoire, comme le fut jusquʼen 2008 Lazare Ponticelli, lʼultime poilu français disparu à 110 ans, sʼappelle Raymond Bonnet. « Il est le dernier survivant des camps de la mort japonais », confie, ému, René Poujade, 96 ans, lʼun de ses frères dʼarmes, secrétaire général de la Fédération des réseaux de la Résistance en Indochine (1940-1945).


A Antibes, dans les Alpes-Maritimes, la maison de Raymond Bonnet est à lʼabri du tumulte habituel de la Côte dʼAzur. Dans le jardin, deux mimosas en fleur et une fontaine dont lʼeau coule en douce cascade.


Lʼancien guerrier, commandeur de la Légion dʼhonneur, médaillé de la Résistance et auteur de tant dʼactes de bravoure, aspire au calme et aux grasses matinées : « Cʼest idiot, mais figurez-vous que jʼai mal aux os, la seule chose que les Japonais ont bien voulu me laisser. » 25 kg perdus en quelques semaines Depuis le décès de son épouse, le vieux monsieur de 93 ans vit seul, épaulé au quotidien par uneemployée de maison. Jambes interminables, longues mains, il a un beau visage sec à la Mauriac. On le lui dit. « Cʼétait un écrivain engagé. Nous avons donc un point commun. Sinon, jʼécris moi aussi, mais des souvenirs, juste des souvenirs », sourit-il, en saisissant un livre posé à côté de lui : Condamné à mort par les Japonais.

DʼAurillac à Saïgon, tribulations dʼun résistant (1941-1946) (Editions du Bailli de Suffren, 2014). « Vous voyez, jʼai utilisé le mot tribulations, car il ne faut pas imaginer que nous étions les rois de lʼorganisation. Je me demande parfois comment nous avons fait pour réussir… »


Le récit de sa vie de maquisard, de sous-lieutenant parachuté fin février 1945 en Indochine avec deux camarades pour y organiser la lutte contre le Japon, puis de leur dénonciation, lui échappe souvent. Dans son livre, ce héros décrit lʼenfer de lʼemprisonnement et des interrogatoires dans les cellules de la sûreté à Phnom Penh : les bastonnades au bambou et au rotin, le supplice de lʼeau qui noie les poumons, la vie en cage dont les parois étaient recouvertes dʼexcréments, les parasites, la faim, la perte de 25 kg en quelques semaines…


Les yeux tournés vers son jardin, il confirme tout cela : « Pour entrer dans la cage, il fallait passer à quatre pattes par un petit portillon de 50 cm de haut. Nous avions lʼinterdiction de nous adosser sur les parois.
Nous avions ordre de rester assis en tailleur au milieu de notre prison de 6 heures du matin jusquʼà 8 heures le soir. Cʼétait très éprouvant. » On sent la fatigue le gagner. Il doit se reposer.

Avant de gagner sa chambre, il ajoute seulement : « La guerre de 1945 ne sʼest pas finie le 8 mai. Jusquʼà la capitulation japonaise, des hommes et des femmes ont continué à se battre et à souffrir en Indochine. Cʼest important dʼen parler. Eux aussi servaient les intérêts de la France. »


En ce dimanche 6 mars, le soleil chauffe les pavés des Invalides à Paris. Il règne comme un avant-goût de printemps. Un petit groupe avance lentement vers la cathédrale Saint-Louis. Une quarantaine dʼanciens sont venus honorer, comme chaque année, les milliers de victimes du coup de force japonais du 9 mars 1945. La plaque mémorielle qui leur rend hommage était placée jusquʼà maintenant sur un chevalet dans la galerie de la cour dʼhonneur. Elle a enfin trouvé place dans lʼéglise des soldats, au pied de lʼautel de la Vierge Marie. Malade, Serge Huet, 85 ans, président du Groupement des rescapés du 9 mars 1945 en Indochine, a failli ne pas venir. « Les Invalides, cʼest bien pour nous qui sommes des pièces de musée », sʼefforce-t-il de plaisanter malgré la douleur qui le fait grimacer.


« Les oubliés du bout du monde »
Le soir du 9 mars 1945, il se trouvait avec sa famille à My Tho, au sud de Saïgon, dans le delta du Mékong.
Lʼadolescent quʼil était alors a vu des marins français abattus à bout portant par les soldats japonais alors quʼils se rendaient, mains en lʼair. Il entend encore les cris de cette femme dont le mari venait dʼêtre tué devant elle, et qui a avalé du détergent pour en finir.

« Vous vous rendez compte, il a fallu attendre 2016 pour que deux de nos morts en déportation soient enfin reconnus… En réalité, nous avons été les oubliés du bout du monde, pendant la guerre et après. »


Lʼesprit de la loi Badinter tourné vers les victimes de lʼHolocauste ne peut expliquer à elle seule ce trop long silence. Depuis 1951, les outils juridiques existent pour reconnaître ces martyrs morts en Indochine.


Pourquoi un tel retard ? Chef du département de la mémoire à lʼONACVG, Benjamin Foissey avance lʼexplication la plus plausible : « Pendant les années qui ont suivi la Libération, le récit gaullo-communiste a éludé ces événements car les militaires dʼIndochine étaient membres de lʼarmée dʼarmistice, et donc considérés comme des pétainistes. » Indignes, par conséquent. Historien, spécialiste de lʼAsie, Jean-Louis Margolin évoque une autre raison : « Seul le lobby colonial aurait pu prendre leur défense.

Mais dans les années 1950, on assiste à une montée générale de lʼanticolonialisme notamment porté par le Parti communiste. Les rapatriés dʼAlgérie ont eu droit au même mépris. »
Serge Huet se souvient de son retour en métropole en juillet 1946. « Nous pensions être bien accueillis.
Mais quand le bateau sʼest amarré dans le port de Toulon, les dockers de la CGT nous ont insultés : “Où vous les avez mis vos lingots dʼor ? Sales exploiteurs…” Beaucoup dʼentre nous ont pleuré. »


François Cartigny a la ferme intention de continuer à défendre « ces abandonnés, ces voix qui se sont tues sans que personne ne les entende ». Si les premières mentions « Mort en déportation » ont été attribuées à deux Martiniquais, cʼest simplement parce que le juriste est tombé amoureux de « cette île enchanteresse » et de ses habitants en 1986, quand il sʼy installe pour vingt ans comme notaire. Lʼhistoire de ce bout de terre le passionne. Il est ainsi devenu le président du Comité pour un mémorial martiniquais de la Résistance, de la déportation et de lʼinternement.


Aujourdʼhui, son combat devient plus politique. Le 31 mars, il a rendez-vous avec Régine Povéda, députée PS dans le Lot-et-Garonne, département où il réside désormais, dans le petit village dʼEscassefort, pour quʼelle le soutienne dans sa volonté de faire modifier la loi du 15 avril 1954. Le texte consacre le dernier dimanche dʼavril « au souvenir des victimes de la déportation et morts dans les camps de concentration du IIIe Reich au cours de la guerre 1939-1945 ». François Cartigny propose de lʼamender en ajoutant une petite incise : « et de lʼempire du Japon, en Indochine ». Quelques mots, juste quelques mots, pour rendre
enfin justice à ces oubliés de la patrie.

SOURCE : LE MONDE | 11.03.2016

Par Marie-Béatrice Baudet (Antibes (Alpes-Maritimes), Escassefort (Lot-et-Garonne), envoyée spéciale).

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