ANAPI

Chronologie du procès : 1992 – 1993

Chronologie des événements et des procédures

Le 15 janvier 1992
G. BOUDAREL dépose une plainte contre personnes non dénommées et se constitue partie civile devant le doyen des Juges d’Instruction du tribunal de Grande Instance de Paris du « chef de dénonciation calomnieuse », passible de l’Article 373 du Code Pénal.

Il soutient que la plainte déposée initialement contre lui par W.SOBANSKY et l’ANAPI du « Chef de crimes contre l’humanité » caractérisait le délit de dénonciation calomnieuse dans la mesure où les accusations qui y étaient formulées avaient été déclarées « infondées » par l’arrêt rendu le 20 décembre 1991 par la Chambre d’Accusation de la Cour d’Appel de Paris .

Le Juge GETTY, mis en charge du dossier, confie la Commission rogatoire à la section de Recherche de la gendarmerie de Paris. Celle-ci convoque pour audition de nombreux anciens prisonniers à Paris et en province, dont le général de SESMAISONS, Président de l’ANAPI, nommément mis en cause.
L’enquête minutieuse de la gendarmerie dure jusqu’au mois de juin 1994, donnant lieu à la rédaction de vingt-trois volumes.

27 Novembre 1992 : Arrêt TOUVIER faisant jurisprudence dans l’affaire BOUDAREL

Rappel des faits.
Paul TOUVIER (3-4-1915 + 17-7-1996) avait été le chef de la Milice à Chambéry en 1943, puis à LYON d’octobre 1943 à septembre 1944. A ce titre, il avait été complice de l’assassinat de sept otages juifs le 29-6-1944 à Rillieux-la-Pape. Il s’ensuivit pour lui, qui était en fuite, une procédure judiciare qui va durer cinquante ans.

Condamné à mort par contumace à plusieurs reprises, en 1945,1946 et 1947, il est arrêté le 3-7-1947, s’évade le 9-7-1947, puis il est grâcié le 27-1-1981. Arrêté à nouveau en 1991, il est finalement libéré pour raison médicale.

Devant la Cour d’Appel de Paris, il obtient un non-lieu le 13-4-1992, l’accusation de « crime contre l’humanité » n’étant pas retenue.

Le 27-11-1992, dans son arrêt rendu en séance publique, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation émet un avis de « cassation partielle sur les pourvois formés par le Procureur général près la cour d’appel de Paris (N° 92-82409). Elle « casse et annule l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 13 avril 1992 et renvoie la cause et les parties devant la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Versailles ». (Par la suite, renvoyé aux Assises, TOUVIER sera condamné à la réclusion criminelle à perpétuité le 20-3-1994, et décèdera en détention le 17-7-1996.)

En ce qui concerne les CRIMES CONTRE L’HUMANITE, cet arrêt du 27-11-1992 précise expressément, page 29 paragraphe n°3 :

«  Les auteurs et complices de crimes contre l’humanité tels que définis par l’article 6 du Tribunal international de Nuremberg ne sont punis que s’ils ont agi pour le compte d’un pays européen de l’Axe  ». C’est-à-dire l’Allemagne ou l’Italie.

1er Avril 1993
En séance plénière et devant les victimes de BOUDAREL médusées et outrées, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation rejette le pourvoi formé par W.SOBANSKY et l ‘ANAPI, en se basant notamment sur le fondement de l’arrêt TOUVIER du 27 novembre 1992 et sur la loi d’amnistie du 18 juin 1966.
Unanimes, les anciens prisonniers se lèvent et imposent une minute de silence à la mémoire des deux cent cinquante soldats morts au Camp113 à l’époque où y sévissait G. BOUDAREL.

19 Mai 1993
Confirmation par G.BOUDAREL, devant le Juge GETTY, de sa plainte pour « dénonciation calomnieuse ». W. SOBANSKY est convoqué par le Juge qui lui notifie cette décision.

Views: 13

Chronologie du procès : 1992 – 1993 Lire la suite »

Chronologie du procès : 1991

Chronologie des événements et des procédures

13 février 1991
Au cours d’un colloque organisé au Sénat par le Centre des Hautes Etudes sur l’Afrique et l’Asie Modernes, Jean Jacques Beucler demande à prendre la parole au nom de ses camarades.
Ayant été prisonnier quatre ans, ancien député et Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants, il dénonce publiquement Boudarel pour sa participation à l’endoctrinement et à l’extermination d’un grand nombre de captifs dans un camp du Tonkin en 1953.

3 Avril 1991
Wladislas SOBANSKI et l’ANAPI, représentée par le général Y. de SESMAISONS son Président, déposent une plainte assortie d’une constitution de partie civile entre les mains du Doyen des Juges d’Instruction de Paris contre Georges BOUDAREL « du chef de crimes contre l’humanité ».

Ils dénoncent les agissements de ce dernier qui, en tant que commissaire politique adjoint au commandant du camp 113 en 1953, s’était rendu responsable de la persécution et de la mort de nombreux prisonniers.

A l’appui de cette plainte, l’avocat des parties civiles produit une quarantaine d’attestations d’anciens prisonniers du camp 113 où ils avaient connu G. BOUDAREL.

Les plaignants exposent que des militaires du Corps Expéditionnaire Français d’Extrême Orient (CEFEO) avaient été faits prisonniers au Tonkin et détenus dans le camp n°113 situé au Nord Vietnam.
Ils dénoncent les agissements de G. BOUDAREL car, en sa qualité d’adjoint au Commissaire Politique et au commandant de ce camp, il aurait été responsable, de février 1953 à janvier 1954, de la persécution et de la mort de nombreux prisonniers de guerre.

Ils précisent que les prisonniers étaient détenus dans un camp isolé en pleine jungle, privé de vêtements et de chaussures, exposé sans soins aux maladies tropicales, délibérément affaiblis par la dénutrition et soumis à l’épuisement de corvées pénibles et de marches forcées.
Les parties civiles affirment que les prisonniers pouvaient trouver leur salut dans leur libération à condition que celle-ci fût décidée par le commissaire politique qui la subordonnait à leur endoctrinement.

Selon elles, BOUDAREL accordait la liberté aux prisonniers qui, à force d’autocritique, paraissaient convertis au marxisme et acquis au combat communiste pour la Paix.

L’avocat des parties civiles produit à l’appui de cette plainte une quarantaine d’attestations d’anciens prisonniers du Camp113, ainsi que des extraits de presse tel l’article : « Le lavage de cerveau » du colonel André BRUGE (captif pendant cinq ans), publié par la revue HISTORIA.

23 mai 1991
Au vu de cette plainte, le Procureur de la République de Paris prend des réquisitions de refus d’informer fondées sur l’article 30 de la loi N° 66 409 du 18 juin 1966, portant amnistie.

13 Septembre 1991
Madame Alice LE HOUX, juge d’instruction, émet une ordonnance estimant que les actes énoncés par les parties civiles, à les supposer établis, sont constitutifs de crimes contre l’humanité, selon l’article C-6 du statut du tribunal Militaire International de Nuremberg, annexé à l’accord de Londres de 8 août 1945, et à ce titre imprescriptibles

Elle décide donc, contrairement aux décisions du Parquet, d’informer sur la plainte aux fins d’établir si les comportements reprochés à Georges BOUDAREL par les parties civiles pouvaient être qualifiés de crimes contre l’humanité.

20 Décembre 1991
Statuant sur l’appel interjeté le 13 septembre 1991 par le Ministère Public, un arrêt de la Chambre d’Accusation de la Cour d’Appel de Paris qualifie, à l’appui de cette plainte, les faits susceptibles d’être reprochés à Georges BOUDAREL de crimes contre l’humanité, mais admet que la loi d’Amnistie du 18 juin 1966 leur est applicable et que, par l’effet de cette amnistie, l’action publique est éteinte de sorte qu’il n’y a pas lieu d’informer.

Elle confirme ainsi la bonne foi des plaignants.

Deux actions sont alors engagées simultanément.
L’une par l’ANAPI et W.SOBANSKI qui déposent aussitôt un recours auprès de la Cour de Cassation.
L’autre par G. BOUDAREL lui-même, conforté par l’Arrêt de la Chambre d’Accusation du 20 décembre et assisté par Maître Antoine COMTE, son avocat.

Views: 13

Chronologie du procès : 1991 Lire la suite »

Le procès

    Justification et fondement juridiques de la procédure judiciaire engagée contre Georges Boudarel


Depuis la création de l’ANAPI (Association Nationale des Prisonniers et Internés d’Indochine), un bruit courait parmi les adhérents. Un homme ayant été commissaire politique dans un camp de prisonniers du Tonkin enseignait à Paris VII (Jussieu).

Un certain colonel Mitjaville, lui-même ancien prisonnier du Viet-Minh, se souvenait de lui et, avant sa mort, avait fait promettre à ses pairs de rechercher, retrouver et poursuivre ce Français qui, à ses yeux, avait été complice, sinon responsable, de la mort de nombreux captifs dans un camp du Tonkin.

Mais nul n’avait réussi à retrouver sa trace jusqu’au jour fatidique du 13 février 1991, où lui-même était venu s’afficher au grand jour en participant à un colloque au Sénat, ouvert au public, où se trouvaient de nombreux anciens prisonniers du Viet-Minh. C’était l’occasion de donner suite au serment de Mitjaville.

En dépit de l’amnistie dont il a bénécié en 1966, il existait un fondement juridique aux poursuites qui allaient être engagées, puisque l’action conduite par le transfuge du camp 113 relevait du crime contre l’humanité tel qu’il a été défini par le Tribunal International de Nuremberg. Pour ce dernier, il s’agit « d’une criminalité systématique découlant directement d’une doctrine monstrueuse, appliquée par un Etat pratiquant une politique d’hégémonie idéologique et d’intolérance active ».

Dans les camps viets où avait lieu l’endoctrinement systématique des détenus, baptisé pudiquement « instruction politique », étaient réunis tous les éléments constituant le crime contre l’humanité au sens de la Convention des Nations Unies du 9 décembre 1948 : « Atteintes graves à l’intégrité physique et mentale du groupe ; soumission intentionnelle de celui-ci à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ».

La mortalité avait dépassé 59%, nombre supérieur à celui des camps de concentrations nazis.
En France, la loi du 26-12-1964 déclare imprescriptibles les crimes contre l’humanité, en se référant aux textes internationaux fondés sur la Charte du Tribunal International de Nuremberg qui définissait ces crimes comme « l’assassinat et l’extermination, la réduction en esclavage …ou bien la persécution pour des motifs politiques, raciaux ou religieux ».

Le 20-12-1985, la Cour de Cassation les avait définis dans un arrêt comme « les actes inhumains et les persécutions qui, au nom d’un Etat pratiquant une politique d’hégémonie idéologique, ont été commis de façon systématique, non seulement contre des personnes en raison de leur appartenance à une communauté raciale ou religieuse, mais aussi contre les adversaires de cette politique quelle que soit la forme de leur opposition ».

Les exactions commises dans les camps de prisonniers du Viet-Minh, en particulier au camp 113, répondaient en tous points aux critères ainsi définis aux plans international et national, et la France elle-même avait déclaré imprescriptibles les crimes commis.

Boudarel reconnaissait lui-même dans ses écrits que, lui présent au Camp-113, 50% des captifs étaient morts !

Quant à Mao Tsé Tung, « le grand frère », il avait, par l’intermédiaire de ses conseillers chinois, indiqué au Viet Minh la voix à suivre en écrivant qu’il s’agissait « de convaincre progressivement une population en recourant à un mélange de terrorisme sélectif, d’intimidation, de persuasion et d’agitation massive ».

L’engagement d’une procédure judiciaire contre Georges.BOUDAREL apparaissait justifiée.

Views: 39

Le procès Lire la suite »

Biographie de Boudarel

Biographie de Georges Boudarel

Georges Boudarel

(21-12-1926 – 29-12-2003)


Né le 21-12-1926 à Saint-Etienne (Loire) dans une famille catholique, Geoges Boudarel fait de bonnes études chez les Pères Maristes, puis obtient sa licence de philosophie.

Prend sa carte du Parti Communiste Français en 1946. Nommé enseignant en Indochine, alors qu’il n’a pas encore effectué son service militaire et se trouve en situation de « sursis », embarque sur le SS « PASTEUR » au début d’avril 1948. Débarqué en Cochinchine, il est affecté au Lycée Yersin de Dalat comme professeur de philosophie.

Entre temps, à Saïgon, il établit des contacts suivis avec la cellule du Kominform appelée « Groupe culturel marxiste numéro 106 ».

Il remplit alors diverses missions pour l’Education Nationale : correction du baccalauréat à Hanoï (juin 1949), stage au Collège de Vientiane au Laos (automne 1949), affectation au lycée Marie Curie à Saïgon (fin 1949).

En 1950, il décide de sauter le pas, écrit-il, et rejoint le maquis viet-minh. Il y sert pendant deux ans. Plus tard, il sera appelé sous les drapeaux sur le territoire indochinois et, ne se présentant pas aux autorités militaires françaises, il sera considéré comme « insoumis », et non comme déserteur.

Pendant cette période, il devient membre du Parti Communiste Indochinois qui se transforme peu après, le 3 mars 1951, en Parti des travailleurs (Dang Lao Dong). Il est affecté à la radio « Saïgon-Cholon libre » où il a en charge l’émission en français. Il prend le nom vietnamien de Daï Dong, c’est-à-dire : Fraternité universelle.

Fin 1951, il est désigné pour servir au Nord en vue de faire de la propagande en faveur de la paix et du rapatriement du Corps Expéditionnaire français (CEFEO) auprès des prisonniers que le Viet Minh envisage de libérer pour faciliter la fin des hostilités.

Il est mis en route début 1952 et mettra presque un an à rejoindre le Tonkin, en passant par les pistes de montagne de la Cordillère Annamitique, et en évitant soigneusement les forces françaises.

Le 22 décembre 1952, il arrive au Viet-Bac (Zone « libérée » par le Viet Minh au Tonkin) et se voit nommé Instructeur Politique adjoint au commissaire politique du Camp 113. Il est assimilé à un chef de compagnie (Daï Dôï Truong) avec une rémunération triple, soit trois kilos de paddy par jour. Le kilo de paddy, riz non décortiqué, est alors l’unité monétaire dans les zones occupées par le Viet-Minh.

Il arrive le 7 février 1953 au camp 113, situé à Lang-Kieu non loin de la frontière de Chine, au sud d’Ha-Giang, dans le bassin de la Rivière Claire (Song Lô), à une vingtaine de kilomètres de Vinh Thuy.

Il y appliquera consciencieusement le programme de lavage de cerveau conçu par le Dich Van, organisme du gouvernement central chargé de la rééducation politique des prisonniers de guerre.

Il mesure parfaitement les absurdités du système, et parfois même son ignominie, surtout lorsqu’il constate le taux très élevé de la mortalité parmi les captifs : 50%, au sujet duquel il alerte sans succès sa hiérarchie. Il écrira par la suite : « Comme les détenus, j’étais prisonnier du système » (Voir son Autobiographie).

Il quitte le camp 113 en février 1954 et se voit affecté à l’émetteur radio La voix du Vietnam, situé dans un endroit tenu secret du Tonkin.

En octobre 1954, à la suite des accords de Genève, il rejoint Hanoï où il restera dix ans.

Déçu par l’évolution du régime communiste et les purges de 1955-1956 qu’il décrira plus tard dans un livre témoignage Cent fleurs éclosent dans la nuit du Vietnam (Jacques Bertoin-1991), il quitte le Vietnam et se réfugie à Prague en 1964. Il y obtient un poste à l’Institut d’Etudes Orientales, puis il entre comme rédacteur à la Fédération Syndicale Mondiale. Il découvre alors la sclérose du système communiste kafkaïen dénoncé par Kroutchev.

Entre temps, en France, il a été condamné à mort pour insoumission et désertion.
Le 17 juin 1966, à Paris, l’Assemblée Nationale vote la loi d’amnistie relative aux infractions commises en relation avec les évènements d’Algérie. Un amendement communiste constitue l’article 30 de cette loi. Il stipule que « sont amnistiés de plein droit tous crimes et délits commis en liaison avec les évènements consécutifs à l’insurrection vietnamienne, et antérieurement au 1er octobre 1957 ».

Georges Boudarel profite de ces dispositions pour rentrer en France après dix-huit ans d’absence qu’il qualifiera pudiquement, par la suite, de « voyage d’études en Extrême- Orient ». Il reprend une vie normale sans être ennuyé, y compris en ce qui concerne son service militaire qu’il n’a pas encore effectué. Grâce à l’amnistie, il est redevenu simple sursitaire. Le réalisme politique prévalant, il en est « exempté pour raison médicale».

Il entre à l’université Jussieu-Paris-7, dès sa création en 1970,et y devient maître de conférence d’Histoire. Il milite pendant un temps au sein du « Front de solidarité Indochine » trotskiste, puis fait deux courts séjours au Vietnam en 1978 et 1989.

Il prend position contre le régime d’Hanoï dont il dénonce les méthodes d’endoctrinement et le système en publiant : La bureaucratie au Vietnam (L’Harmattan-1983).

Il vivra tranquille jusqu’au 13 février 1991. Ce jour-là, au cours d’un colloque organisé au Sénat par le Centre des Hautes Etudes sur l’Afrique et l’Asie Modernes, il doit prendre la parole. Il est alors pris à partie par Jean-Jacques Beucler, ancien ministre et ancien député, qui a été lui-même captif en Indochine quatre ans durant et parle au nom des nombreux anciens prisonniers du Viet-Minh qui l’entourent.

Alors débute « l’affaire Boudarel ».
Il sera soutenu par de nombreuses personnalités de gauche, au nombre desquelles Monsieur Pierre Vidal Naquet, qui, sans pour autant l ‘exonérer, « refuse de cautionner, même par un simple silence, la chasse à l’homme qui est en train de se dérouler » (Le Monde, 23 mars 1991).
Plus tard il quittera le Parti communiste, déclarant au Monde en 1991 : « J’étais stalinien, je le regrette à 100% »…C’était bien tard, le mal était fait.

Il cesse d’exercer à Jussieu en 1992, date de son départ à la retraite.

Views: 84

Biographie de Boudarel Lire la suite »

60e anniversaire

Allocution de M. HAMLAOUI MEKACHERA, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX ANCIENS COMBATTANTS, prononcée le 9 mars 2005 devant la plaque de « Citadelles et Maquis d’Indochine 1939/1945 », au Jardin des Tuileries à Paris.

Voici 60 ans, jour pour jour, le 9 mars 1945, en Indochine, se commettaient des crimes sans nom.
L’attaque surprise des forces de l’Empire japonais contre les forces françaises, ce « coup de force» dont nous nous souvenons aujourd’hui, fut, en effet, d’une brutalité inoubliable et d’une cruauté indescriptible.

Ecoutons, en cet instant, les mots du Général de GAULLE. Ils donnent leur juste valeur à la douloureuse page d’histoire qui nous rassemble ce matin:« les combats succédant soudain à une période prolongée de doutes, de chagrins, d’humiliations, s’étaient déroulés dans les plus amères conditions: surprise, isolement, manque de moyens, impression que Dieu est trop haut et que la France est trop loin. Dans le capital moral d’un peuple, rien ne se perd des peines des soldats».

Aujourd’hui, au nom du Gouvernement de la République, je rends l’hommage qui leur est dû à tous nos combattants, à leur courage, à leur sens élevé de l’honneur, au patriotisme indéfectible dont ils firent preuve dans ces circonstances tragiques.

La France n’a pas oublié, la France n’oublie aucun des siens, militaires, Français libres et Résistants, civils, femmes et enfants, qui affrontèrent l’horreur de la guerre mondiale, si loin de la Métropole.

Entré dans l’Histoire, le capitaine Jean d’HERS, fait Compagnon de la libération par le Général de GAULLE; entrés dans l’Histoire, Edmond GRETHEN, inhumé au Mémorial de la France combattante, au Mont Valérien, le Général LEMONNIER, honoré par une rue en ce lieu si prestigieux, les généraux SABATIER et ALESSANDRI, avec René NICOLAU, le lieutenant-colonel LECOQ et tant d’autres qui mériteraient d’être cités, entrées dans l’Histoire, ces figures emblématiques nous invitent à nous souvenir de tous leurs frères d’armes qui allèrent jusqu’au sacrifice suprême en ce printemps de 1945.
Assiégés, trompés, submergés par un adversaire maintes fois supérieur en nombre, tous firent preuve d’une résistance héroïque. Dans ces mois tragiques et dans la longue

épreuve qui suivit, nos compatriotes portèrent haut les valeurs de bravoure et de dignité. Ils portèrent haut l’image de la France et des Français.

Combattus sur tous les fronts de cet espace immense, ils firent preuve d’audace dans la lutte armée et d’un courage inouï dans l’adversité.

Arrêtés, internés, soumis aux pires tortures, à des traitements dégradants et inhumains, martyrisés dans des camps et lieux de sinistre mémoire, ils ne cessèrent d’être fidèles à la France.
La France qui se souvient aujourd’hui de chacun d’entre eux.

La France qui se souvient que les Indochinois partagèrent, avec une fidélité et une loyauté remarquable, ce sort cruel.

La France qui se souviendra, dans quelques mois, de ces hommes qui prirent toute leur part à la Victoire. Le 2 septembre, à Fréjus, le dévoilement d’une plaque à leur mémoire permettra de renouveler l’expression de notre reconnaissance.

Aux acteurs et aux témoins de ces événements, dramatiques et héroïques, à leurs descendants et à leurs proches, à leurs familles, aux associations et à tous ceux qui gardent leur mémoire, j’exprime mon respect et celui de la Nation.

60 ans ont passé. La carte et les données géopolitiques de cette région ont été complètement bouleversées, au prix, souvent, de nouvelles souffrances.

60 ans ont passé. Les ennemis d’hier sont devenus alliés, partenaires, amis. Ils partagent et défendent les mêmes valeurs de démocratie, du combat pour la liberté et pour
les droits de l’homme. ‘

Construire ensemble et proposer aux générations futures un avenir qui conjugue durablement paix, respect du droit et liberté, c’est le plus beau des hommages que nous puissions rendre à ceux qui ont tout donné pour que la France soit à la table des vainqueurs, pour que la France demeure une puissance souveraine et respectée.

Oui, les combattants ont bien mérité de la Patrie.

Views: 17

60e anniversaire Lire la suite »

La Kempétaï

 Sœur jumelle par sa brutalité de la GESTAPO, la KEMPETAI tendait à l’anéantissement de la plus élémentaire dignité humaine.

Les « Services Spéciaux » de l’armée Japonaise veillaient avec beaucoup d’attention à ce qu’aucune preuve ne soit conservée de leurs agissements criminels.

Si la photographie et le film purent révéler au monde l’horreur des camps de concentration nazis, rien ne permet d’illustrer ce que vécurent ses hommes qui furent enfermés dans des « cages » et traités sans la plus élémentaire considération de la personne humaine.

C’est pourquoi, nous avons jugé nécessaire de produire dans son intégralité le texte et les dessins de G.H.P. qui constituent un document unique en mémoire de ceux qui vécurent l’enfer de la KEMPETAÏ.

Ces illustrations sont extraites d’une brochure parue à Saigon en 1947. Ils constituent l’unique document par l’image rappelant les traitements infligés aux prisonniers.

L’ANAPI remercie la Présidente de l’Association « Citadelles et Maquis d’Indochine » qui a bien voulu lui communiquer ce document.

Views: 44

La Kempétaï Lire la suite »

Les prisonniers

Il n’y a pas d’estimation précise du nombre de prisonniers en raison des massacres de captifs le 9 mars 1945 et les jours suivants et des disparitions en brousse des gens cherchant à fuir.

Les prisonniers étaient des militaires de tous grades, des gendarmes, des policiers et agents de la sûreté, des douaniers, des fonctionnaires ou agents de services publics ayant des postes de responsabilité. La majorité était constituée de métropolitains puis de métis envers lesquels les japonais faisaient montre de leur haine raciste.

Il convient de rappeler que de nombreux militaires et civils furent secourus par leurs épouses indochinoises qui prirent tous les risques pour les localiser et pour leur apporter une aide matérielle malgré la surveillance des japonais.

Beaucoup de familles furent assignées à résidence ou internées et parmi elles de nombreuses femmes, métropolitaines, métisses et autochtones subirent de graves sévices et des tortures morales d’une rare perversité.

En septembre 1945 après la défaite japonaise nombre de prisonniers se libérèrent d’eux mêmes et reprirent les armes, d’autres, internés en brousse, durent attendre l’arrivée de représentants des forces alliées pour que cesse leur captivité. L’internement des familles prit fin dès le dépôt des armes par les japonais, mais certaines familles internées en ANNAM et quelques militaires furent remises par les anciens occupants à des éléments viêt-minh et durent attendre le premier trimestre de l’année 1946 pour rejoindre la liberté.

Views: 17

Les prisonniers Lire la suite »

Exemples d’exactions commises

Nous terminerons en citant quelques exemples des crimes et atrocités qui furent perpétrés par les troupes Japonaises lors de leur occupation en Indochine.
1 – Exécutions, Massacres et Décapitations

  •     Au FORT DE DONGDANG : Une cinquantaine de Français de tous grades furent massacrés (fusillade et escrime à la baïonnette sur les survivants). Un rescapé.
  •     Au FORT BRIERE DE L’ISLE : Une soixantaine de Français de tous grades sont massacrés (fusillade, puis escrime à la baïonnette sur les survivants). Deux rescapés.
  •     A LANGSON : Les survivants de deux sections du 19ème RMIC sont emmenés devant une tranchée et exécutés (fusillade et escrime à la baïonnette sur les survivants).
  •     A DINHLAP : Officiers Français et Annamites sont décapités. La moitié des tirailleurs Annamites furent fusillés.

  •     A NAKAY : Dix Français furent exécutés à coup de fusils ou de mitraillettes au KM 87/700. Les corps ne furent pas enterrés.
  •     REGION DE BACGIANG : De la garnison de la caserne du 5ème RTT immédiatement après la reddition, sur un effectif de 51 militaires Français, 45 furent abattus à coup de bâtons et de baïonnettes. Quatre survivants grièvement blessés.
  •     A TAKHEK : Dans une fosse, 11 Français ont été précipités. La presque totalité avait les yeux bandés. Une dizaine de décapitations ont été constatées, la tête manquant, ou nettement détachée et mise à coté du corps.
  •     REGION DE BACGIANG : 22 militaires de tous grades sont exécutés le 10 mars sur les bords de la Rivière Claire. Les 13 et 14 mars, 13 légionnaires sont exécutés. Le 14 mars, 14 soldats, marins et légionnaires sont exécutés derrière l’église.
  •     Au FORT DE DONGDANG : après la prise du poste, le caporal infirmier est tombé dans la tranchée, le cou à demi tranché , il survivra au coup de sabre d’un soldat japonais.

2 – Brutalité et sévices sur des adolescents déportés au camp de Paksong (Laos)

En violation flagrante des conventions internationales de Genève, les Japonais ont fait subir à des enfants de troupes âgés de 13 à 17 ans, le sort de tous les militaires prisonniers de guerre. Ils ont été particulièrement cruels envers ces adolescents en les transférant de Pnom-Penh en juin 1945 au camp de représailles de Paksong via Paksé (Laos).

Au cours de leur internement à Paksong, ces enfants étaient astreints aux travaux forcés de construction de pont et de route et étaient pour la plupart victimes de graves sévices et d’odieuses brutalités de la part des geôliers nippons. Voici trois exemples parmi tant d’autres :

  •     un enfant de troupe de 15 ans , en pleine crise de paludisme, incapable de se lever pour le rassemblement du matin, a été sauvagement frappé par la sentinelle japonaise à coups de crosse et à coups de pieds sur le corps et sur la tête jusqu’à son évanouissement sur les rondins de bambous servant de bât-flanc.
  •     un autre jeune, de corvée de déchargement d’un camion, a brisé malencontreusement une petite jarre de mélasse destinée aux japonais ; brutalement frappé à coups de bambou lesté, il est ensuite enduit de cette mélasse sur le torse et sur les jambes et attaché à un tronc d’arbre sur une fourmilière durant plus de deux heures.
  •     un adolescent de 16 ans, affaibli par la dysenterie, épuisé par de durs travaux et nettement sous alimenté pour son âge, est tombé d’épuisement au cours des travaux de transport de billes de bois ; adossé à un tronc d’arbre pour se reposer, il est aussitôt frappé à coups de crosse et à coups de bambous jusqu’à perte de connaissance ; le gardien japonais a continué à s’acharner sur le corps du gamin évanoui.

De tels sévices étaient monnaie courante au camp de Paksong. Peu de prisonniers auraient pu tenir à ce régime quelque mois de plus.

Views: 26

Exemples d’exactions commises Lire la suite »

La captivité

Il n’y a pas d’estimation précise sur le nombre de prisonniers en raison des massacres de captifs le 9 mars 1945 et les jours suivants et des disparitions en brousse des gens cherchant à fuir.

Les prisonniers étaient en majorité des militaires de tous grades, des gendarmes, des policiers et agents de la sûreté, des douaniers, des fonctionnaires ou agents de services publics ayant des postes de responsabilité. La majorité était constituée de métropolitains et de métis envers lesquels les japonais faisaient montre de leur haine raciste.

Il convient de rappeler que de nombreux militaires et civils furent secourus par leurs épouses indochinoises qui prirent tous les risques pour les localiser et pour leur apporter une aide matérielle malgré la surveillance des japonais.

Beaucoup de familles furent assignées à résidence ou internées et parmi elles de nombreuses femmes, métropolitaines, métisses et autochtones subirent de graves sévices et des tortures morales d’une rare perversité.

En septembre 1945 après la défaite japonaise nombre de prisonniers se libérèrent d’eux mêmes et reprirent les armes, d’autres internés en brousse durent attendre l’arrivée de représentants des forces alliées pour que cesse leur captivité. L’internement des familles prit fin dès le dépôt des armes par les japonais, mais certaines familles internées en Annam et quelques militaires furent remis par les anciens occupants à des éléments viêt-minh et durent attendre le premier trimestre de l’année 1946 pour rejoindre la liberté.

A tout moment de leur captivité, les prisonniers eurent à subir la brutalité et la hargne de l’ennemi. La mortalité peut paraître faible par rapport aux pertes subies dans d’autres captivités, notamment celles reconnues chez les captifs du Viet-Minh. Il est bon toutefois de rappeler que cet internement ne dura que six mois. On peut imaginer ce que seraient devenues les pertes si la captivité avait duré plusieurs années.

La férocité de l’ennemi s’est épanouie principalement dans la zone frontière du Tonkin au début de la captivité. Le massacre des prisonniers fut systématique (Langson, Haïphong, Bac-Ghiang, Thakhek, etc.). Un certain raffinement sadique fut même mise en œuvre au cours de ces exécutions : invitations, boucliers humains, jeux suivis de décapitation, etc.

Les enfants de Troupe de Dalat, repliés sur le Cambodge, furent dirigés, malgré leur jeune âge, vers la prison de Kratié, tristement connue pour ses horribles atrocités, avant d’être envoyés à Paksé et à Paksong.

Pendant les premiers mois, certains prisonniers purent paraître protégés en restant dans leur cantonnement ou dans le voisinage (Hué, Bal-Me-Thiot, Thu-Do-Mot, etc.) mais dès le mois de mai et début juin 1945, ce fut la grande migration dans des conditions de transport, de marches extrêtement pénibles, vers la citadelle d’Hanoï, ou la camp Martin des Pallières à Saïgon.

L’arrivée massive de ces prisonniers fatigués, anémiés, sous-alimentés (4 à 5000 par camp) allait gravement perturber les normes d’hygiène et de salubrité ; les conditions climatiques, le manque de médicament, l’absence d’une nourriture suffisante aidant, la mortalité devint extrême.

Cette mortalité n’augmente pas assez vite au goût des Japonais qui vont envoyer, à partir de la fin juin 1945, plus de 2000 prisonniers dans les zones les plus insalubres : Paksung et plus particulièrement Hoa-Binh, créant là de « véritables camps de la mort lente » de la RC6.

Comble de cruauté, à la fin de la guerre, la « solution finale » fut envisagée pour les Européens, créant ainsi une véritable névrose traumatique chez tous les militaires et les civils prisonniers des Japonais.

Rappelons que le Tribunal des criminels de guerre siégeant à Saïgon a condamné à mort et fait exécuter le lieutenant-colonel T. Shigeoru, chef d’état-major de la division japonaise venue de Chine pour attaquer les forces française lors du coup de force du 9 mars 1945.

Views: 20

La captivité Lire la suite »

Le coup de force

 Il y a peu à dire sur l’aspect militaire du coup de force du 9 mars 1945. C’est une opération militaire habituelle des Japonais : surprise, rapidité et cruauté.

La supériorité des troupes nippones était manifeste : supériorité en effectifs, soldats aguerris par de multiples combats dotés de matériels d’équipements et d’armement sophistiqués. Quant aux troupes françaises (18000 hommes et des autochtones peu aguerris et vieillissant), ils sont équipés de matériels et d’armement datant de la guerre de 1914-1918 avec des munitions peu fiables.

En 48 heures, la souveraineté française a complètement été balayée. Plus de 95% des garnisons, après des combats parfois acharnés et très durs, déposent les armes. Quelques unités ont pu s’échapper dans la brousse, notamment au LAOS. La plupart ont été reprises. Grâce à la clairvoyance de certains chefs militaire, dispersant leurs effectifs dès les tous premiers jours de mars, prés de 300 officiers et 5000 soldats, autochtones compris, sont passés en Chine par la haute région, poursuivis et harcelés par les Japonais.

En 1945, l’armée japonaise, vaincue de toutes parts, dispose encore d’importants moyens sur le continent asiatique.

Le 9 mars 1945, il y a près de 40000 Français en Indochine dont 18000 militaires. Près de 12000 ont été faits prisonniers ; plus de 3000 ont été tués, massacrés le 9 mars 1945. Les six mois de captivité ont coûté la vie à plus de 1500 disparus.

Les civils ont été regroupés, confinés soit dans un quartier des grands villes, soit dans des camps. Ceux soupçonnés de résistance ont été incarcérés dans des prisons de la KEMPETAI, dans des cages de bambou, subissant des tortures et des interrogatoires musclés.

Ont été également emprisonnés et déportés dès juin 1945 dans les camps de BOLOVENS, classés camps de concentration, plus de 120 adolescents de 13 à 17 ans, élèves de l’Ecole d’enfants de troupe de DALAT, parce qu’ils ont résisté aux Japonais. Avant de se rendre, ils ont saboté toutes les armes et ont fait sauter la soute à munitions.

Pour les militaires, la captivité de six mois peut être répartie en 4 périodes.

De mars à mai 1945, incarcération dans des citadelles ou dans des camps proches du lieu de capture

De mai à septembre 1945, politique de regroupement progressif des prisonniers à Saïgon et à Hanoï

De juin à septembre 1945, création des camps de concentration (HOA-BINH et BOLOVENS) pour la construction de routes et de ponts

De la reddition japonaise, après les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki en août 1945, jusqu’en septembre 1945 (18 septembre pour le Sud) regroupement de tous les prisonniers à Saïgon et à Hanoï.

Il n’y a pas eu de libération. Les sentinelles japonaises ont disparu le 18 septembre 1945. Et le 22 septembre 1945, parmi tous les prisonniers regroupés à Saïgon, les hommes valides ont été armés et répartis en section de combat pour aller, pieds et torse nus, délivrer SAÏGON de l’emprise VIETMINH.

Views: 31

Le coup de force Lire la suite »

Retour en haut