ANAPI

La présence japonaise en Indochine

Guerre 1939 – 1945 et présence japonaise en Indochine
Le Japon était en guerre larvée contre la Chine dès le début des années 1930 (Affaire du Mandchoukouo, occupation du Tsien-Tsin, etc…). En 1939, une bonne partie de la zone côtière chinoise était occupée par l’armée nippone.

La France, à travers le TONKIN, acheminait au profit des Chinois des vivres, des carburants et des matériels du port de Haïphong jusqu’à Yunnanfou par le chemin de fer Haïphong – Hanoï à Yunnanfou.

C’est une pièce qui se joue entre le Japon et la France en cinq actes.

Acte 1 :

Tout a débuté le lendemain de l’armistice demandé par la France à l’Allemagne nazie.

Le Japon profitant de la situation de faiblesse de la France exige la fermeture de la frontière sino- indochinoise et le contrôle de ces frontières par une commission nippone. Cet ultimatum est transmis par l’Ambassadeur de France à Tokyo au Gouverneur Général de l’Indochine, le général CATROUX, le 19 juin 1940. Celui-ci s’incline sachant qu’il est impossible de résister à une attaque japonaise avec nos faibles moyens sur ce territoire, d’autant plus qu’il ne peut espérer aucune aide extérieure, ni de la Métropole ni des Britanniques, ni des Etats-Unis traditionnellement anti-colonialiste et voulant rester neutres dans cette région.

Le tout nouveau gouvernement de VICHY, désavouant CATROUX, le remplace par l’Amiral DECOUX qui prend ses fonctions le 25 Juillet 1940.
Acte 2 :

Tokyo intensifie ses actions et remet un autre ultimatum à l’Ambassadeur français en août 1940

Cette fois-ci, l’affaire se règle au niveau des gouvernements et l’accord Arsène Henry – Matsouka est signé le 30 août 1040. Il impose à la France le stationnement des troupes nippones au nord du Fleuve Rouge, et l’utilisation de certains ports et aérodromes.

Le Gouvernement de Vichy laisse à DECOUX le soin de négocier les modalités d’application, négociations difficiles et très âpres.

Cet accord d’application est signé in extremis le 22 septembre 1940. Et le même jour, les troupes japonaises de Canton envahissent le nord du TONKIN, passent la frontière à DONGDANG et investissent LANGSON. Nos troupes battent en retraite, abandonnant LANGSON avec des centaines de morts et des prisonniers. Il a fallu un ordre express de l’Empereur du japon pour que l’armée nippone retourne en territoire chinois en libérant les prisonniers.

Nos troupes montrent leur faiblesse (vétusté des équipements et des matériels, médiocre combativité des troupes autochtones). Cette faiblesse est constatée une seconde fois dans l’affaire du SIAM.
Des revers français sur terre au Cambodge en janvier 1941 sont compensés par l’éclatante victoire navale française près de l’île de KOH-CHANG sur la flotte siamoise.
Le Japon impose sa médiation et un traité est signé sous la contrainte avec le SIAM à Tokyo en mai 1941, amputant le Cambodge de près de 2 provinces et le Laos de 2 zones à l’ouest du Mékong.

Les incidents de LANGSON et du SIAM montrent l’isolement de l’INDOCHINE. Ni la Grande-Bretagne, ni les Etats-Unis n’ont voulu intervenir diplomatiquement.

Le Japon, dès le 27 septembre 1940, a signé une alliance Tripartite avec l’Allemagne d’Hitler et l’Italie de Mussolini.

Et, le 13 avril 1941, Matsuouka signe à Moscou un pacte de non agression avec Staline.
Acte 3 :

Il se joue à Vichy. L’Ambassadeur du Japon KATO présente au Gouvernement de Vichy des demandes tendant à permettre l’accès des forces nippones dans toutes les régions d’Indochine. Comme auparavant pour les précédents actes, le Japon reconnaît la souveraineté française en Indochine et respecte l’intégrité du territoire de la Fédération.

Il y a cependant une nouveauté, celle de la « défense commune» de l’Indochine contre toute agression venant de l‘extérieur.

L’accord KATO-DARLAN est signé le 21 juillet 1941 à Vichy. Les négociations pour son application sont laissées à l’initiative de DECOUX. Celui-ci fait traîner les choses jusqu’en décembre 1941.
Acte 4 :

Au lendemain de l’attaque de Pearl Harbour, les Japonais présentent encore un ultimatum à DECOUX demandant l’application sans délai et sans restriction de l’accord Cato-Darlant, sinon le Japon assurera lui-même le contrôle total du territoire indochinois.

L’Amiral DECOUX obtient des Japonais la répartition des zones de défense. La surveillance de la frontière chinoise est confiée aux Français (on sait que la Chine n’a aucune intention d’envahir l’Indochine). Toutes les côtes sont confiées à la défense japonaise contre les possibles débarquements américains ou britanniques.

L’Amiral DECOUX pouvait-il prendre une attitude totalement négative et repousser les exigences nippones au cours du mois de décembre 1941?
« C’était la solution de facilité, écrit Georges GANTIER, celle qui aurait permis de se tailler une réputation de résistant avant la lettre, sur les ruines de la souveraineté française ». Il faudrait ajouter « sur les horribles souffrances et sur les tombes de la plupart des 40000 français présents en Indochine, qu’ils soient militaires ou civils ».

Le Général de Gaulle a déclaré la guerre au Japon dès le lendemain du coup de Pearl Harbour, le 9 décembre 1941.
Acte 5 :

On peut parler d’infléchissement de la politique de DECOUX dés 1943 et des essais souvent infructueux du rapprochement de GAULLE – DECOUX. Mais, il faut également mentionner les dissensions et les rivalités entre les résistants civils et les résistants militaires, mal conçues et organisées par le Général MORDANT.

Conseiller par Monsieur de BOISAUGER, DECOUX envoie un certain Monsieur François à Alger pour prendre contact avec de GAULLE. Ce dernier envoie de LANGLADE en Indochine, porteur d’un message à DECOUX. Cette missive a été modifiée par LANGLADE lui-même qui ne l’a pas remise à DECOUX. Il avait en effet rencontré le Général MORDANT, qui le dissuade de voir le Gouverneur Général et le convainc que l’ennemi N° 1, bien avant les Japonais, s’appelle DECOUX.

MORDANT est nommé Chef de la Résistance en Indochine et délégué au Comité Français de Libération Nationale (C.F.L.N.) Ce choix est loin d’être judicieux, il est qualifié par certains historiens de catastrophique. Résistance mal pensée, mal organisée sur le modèle métropolitain, dans un environnement et un contexte tout à fait différents.

Les Résistants de MORDANT croient fermement à un débarquement allié en Indochine, information fréquemment diffusée par les radios de New-Delhi et de Calcutta ; les Japonais eux-mêmes y croient. On sait aujourd’hui qu’aucun débarquement n’a été prévu dans les plans Américains.

Le Président ROOSVELT l’a explicitement dit le 1er janvier 1945 «  Je ne ferai rien pour libérer l’Indochine de l’emprise japonaise  ».

Le 23 Février 1945, deux semaines avant le coup de force, l’Amiral DECOUX envoie un message au ministre des Colonies. « Le manque de pondération de l’organisation de la Résistance me gêne énormément. L’éviction des troupes japonaises n’est plus qu’une question de temps. Notre intérêt est que des initiatives prématurées ne provoquent pas un coup de force des Japonais, pouvant tout remettre en cause ».

Message transmis mais mal entendu par le Gouvernement à Paris en 1945 et le 9 mars 1945, le drame arrive.

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Contexte historique

Il n’y a pas d’estimation précise du nombre de prisonniers en raison des massacres de captifs le 9 mars 1945 et les jours suivants et des disparitions en brousse des gens cherchant à fuir.

Les prisonniers étaient des militaires de tous grades, des gendarmes, des policiers et agents de la sûreté, des douaniers, des fonctionnaires ou agents de services publics ayant des postes de responsabilité. La majorité était constituée de métropolitains puis de métis envers lesquels les japonais faisaient montre de leur haine raciste.

Il convient de rappeler que de nombreux militaires et civils furent secourus par leurs épouses indochinoises qui prirent tous les risques pour les localiser et pour leur apporter une aide matérielle malgré la surveillance des japonais.

Beaucoup de familles furent assignées à résidence ou internées et parmi elles de nombreuses femmes, métropolitaines, métisses et autochtones subirent de graves sévices et des tortures morales d’une rare perversité.

En septembre 1945 après la défaite japonaise nombre de prisonniers se libérèrent d’eux mêmes et reprirent les armes, d’autres, internés en brousse, durent attendre l’arrivée de représentants des forces alliées pour que cesse leur captivité. L’internement des familles prit fin dès le dépôt des armes par les japonais, mais certaines familles internées en ANNAM et quelques militaires furent remises par les anciens occupants à des éléments viêt-minh et durent attendre le premier trimestre de l’année 1946 pour rejoindre la liberté.

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Témoignages de captivité

2 soldats du Bataillon Français de l’ONU en Corée furent fait prisonniers par les troupes nord-coréennes et chinoises.

Ils furent certes peu nombreux en comparaison du nombre des prisonniers des Japonais et du Vietminh en Indochine. Pourtant, dans le cadre de son devoir de mémoire, l’ANAPI se devait de ne pas les oublier.

Traités sans ménagements, mal nourris, ils subirent à l’occasion le même lavage de cerveau que les prisonniers du Vietminh…

3-Témoignages de captivité
Le 23 septembre 1951 les volontaires STAELENS et DUBOIS sont surpris par une patrouille ennemie alors qu’ils effectuent une corvée d’eau :

« … les mains liées…nous avons marché pendant huit jours, de village en village, avec l’appréhension d’être tués à tout moment. Nous battions du riz pour pouvoir manger à notre faim. Une nuit nous nous sommes évadés mais nous avons été repris par des chinois qui nous ont obligés à transporter du ravitaillement de leur base jusqu’à leurs positions. Ils nous ont rendus aux nord-coréens ; après deux jours attachés, sans boire ni manger, et roués de coups de crosse nous avons rejoint un camp où nous étions traités comme des bêtes et soumis à une propagande communiste intense, mais … en anglais »

Le 6 Octobre 1952, la Section de Pionniers du Bataillon Français dont faisait partie le Sergent BESAMAT fut submergée par l’ampleur d’une attaque ennemie. Blessé par éclats de grenades, il fut fait prisonnier :

« Alors commença pour lui un long et douloureux calvaire par un froid rigoureux. Au cours du trajet d’abord à pied puis en camion vers le “Camp N°3” situé dans le nord de la péninsule coréenne, tout était sujet à recevoir des coups visant ses blessures, accompagnés de sévices. Dans ce camp, le sergent subit d’abord des interrogatoires “musclés”. Puis ce fut l’endoctrinement quotidien à la cause communiste. Le service de propagande ennemi allait jusqu’à fournir aux prisonniers français le journal “L’Humanité”. Le sergent ne fut opéré de ses blessures que 64 jours après avoir été fait prisonnier, sans anesthésie. Le régime alimentaire se limitait à du riz et à un bol de soja le soir, dans le meilleur des cas un morceau de pain, accompagné d’eau chaude comme boisson. »

Le 28 août 1953, à sa libération suite aux accords de Pam Munjom, BESAMAT ne pesait plus que 53 kilos, en ayant perdu 21 en 11 mois de captivité. Il poursuivit sa carrière en Algérie comme pilote d’hélicoptère.[1]

Les prisonniers eurent l’occasion de rencontrer quelques uns des civils français internés, dont le chargé d’affaires à Séoul, monsieur Jean Meadmore, qui, ambassadeur honoraire, est membre de l’association des anciens de Corée.

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Le bataillon de Corée

2 – Le Bataillon de Corée

Le 25 août 1950, l’armée française étant déjà lourdement engagée en Indochine, le gouvernement français décide l’envoi en Corée d’un Bataillon de volontaires, dont le rôle était d’affirmer la présence française aux côtés des autres nations engagées pour résister à la pression de la Corée du Nord et de la Chine soutenues par l’U.R.S.S.
Le 29 novembre 1950, le bataillon débarque à Pusan. Il sera affecté pendant toute la campagne au 23ème Régiment d’Infanterie de la 2ème Division de la 8ème Armée U.S. Il comprendra une compagnie de soldats coréens. Après un mois d’entraînement sous des températures allant jusqu’à moins 40°, il fut engagé dès le 25 décembre dans cette guerre de mouvements et de positions qui durera jusqu’à juillet 1953.

Il mena de très durs combats parfois au corps à corps, par des températures extrême de moins 20 degrés, en employant tous les moyens jusqu’au lance-flammes pour s’emparer des positions ennemies. Si l’aviation des forces communistes n’intervint que rarement au sol, leur artillerie demeura très puissante et active jusqu’à la fin des combats.

Un soldat du Bataillon Français de l’ONU au poste de combat face aux Chinois. (ECPA-D)

Le 23 octobre 1953, le bataillon quitte la Corée pour l’Indochine. Il aura largement rempli sa mission de représenter la France dans la lutte pour la défense de la Liberté.

Devenu régiment à deux bataillons, il servira en Indochine en 1953-1954, formant l’ossature du Groupement Mobile n° 100 avec la bataillon de marche du 43ème R.I.C., le II/10èmè R.A.C. et le3/5ème R.C.Le 24 juin 1954, – Dien Bien Phu est tombé le 7 Mai – le G.M. 100 quitte AN KHE par la R.C. 19, route en corniche bordée d’une végétation très dense. L’opération a été retardée par des contretemps successifs et l’adversaire largement sous-estimé ; le G.M. 100 est condamné car la route est tenue par un ennemi, parfaitement informé, qui va monter une gigantesque embuscade. La puissance des viets est considérable ; assauts après assauts, ils anéantissent les unités. Dans cette embuscade, le G.M. 100 a perdu près d’un millier d’hommes, tués, blessés, disparus. Le I/Corée fut encore engagé trois jours avant le cessez le feu et y perdit les trois quarts de son effectif.

En 1955 le bataillon rejoignit l’Algérie où il fut transformé en régiment à deux E.M.T. ; officiellement il fut rebaptisé 156ème R.I. mais dans la pratique restera désigné comme le Régiment de Corée jusqu’à sa dissolution en 1962

Le Bataillon en Corée reçut 4 citations à l’ordre de l’Armée, 3 citations présidentielles américaines et 2 citations présidentielles coréennes ; en Indochine le I/Corée reçut 1 citation à l’ordre de l’Armée et le II/ Corée 1 citation à l’ordre du Corps d’Armée ; le Régiment redevenu Bataillon fut alors admis au port de la fourragère aux couleurs de la Médaille militaire

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Rappel historique

Les prisonniers de la guerre de Corée.

 

12 soldats du Bataillon Français de l’ONU en Corée furent fait prisonniers par les troupes nord-coréennes et chinoises.

Ils furent certes peu nombreux en comparaison du nombre des prisonniers des Japonais et du Vietminh en Indochine. Pourtant, dans le cadre de son devoir de mémoire, l’ANAPI se devait de ne pas les oublier.

Traités sans ménagements, mal nourris, ils subirent à l’occasion le même lavage de cerveau que les prisonniers du Vietminh…


1 – Rappel historique

La Corée, le pays du « matin calme », est une péninsule montagneuse d’Asie entre la Chine et le Japon. Sous domination japonaise de 1910 à 1945, ce pays fit l’objet en février 1945, à la conférence de Yalta, d’une partition à la hauteur du 38ème parallèle; les soviétiques devant désarmer les troupes japonaises au Nord et les américains au Sud. En fait cette ligne de démarcation devint une frontière politique, les soviétiques ayant installé dans leur zone une « démocratie populaire », très tôt menaçante pour la Corée du Sud.

En 1949, la Chine est devenue communiste. La Corée du Sud occupe une position stratégique en Extrême-Orient. Le Japon est neutralisé et les Etats-Unis centrent leurs efforts sur la protection de Taiwan et l’aide aux français en Indochine. La Corée du Sud, qui n’entre pas dans l’aire de sécurité américaine et ne dispose que d’une petite armée sans aviation et sans blindés, constitue une proie tentante en même temps qu’une étape pour l’expansion communiste.

Le 25 juin 1950, les forces Nord-coréennes franchissent le 38ème parallèle. Ainsi s’ouvre le conflit le plus important de la guerre froide qui oppose le monde communiste au monde démocratique ; il s’internationalise immédiatement ; Le président des Etats-Unis, Harry TRUMAN, ordonne aux forces américaines du Pacifique d’intervenir aux cotés de la petite armée sud-coréenne ; initialement ils ne pourront ensemble qu’à peine contenir la puissante armée des agresseurs ; coréens et américains se retrouvent assiégés dans un périmètre restreint autour du port de Pusan.

Le 27 juin 1950, le Conseil de Sécurité de l’ONU, en l’absence de l’Union Soviétique, prend une résolution, soutenue par les Etats-Unis, décidant la constitution d’une armée formée de seize nations, dont la France, qui envoie un navire et plus tard un bataillon de volontaires commandé par le général MONCLAR

Les forces des Nations-Unies vont reprendre l’initiative, encercler les nord-coréens par un débarquement sur leurs arrières, et pousser jusqu’à la frontière chinoise. Mais la Chine intervient à son tour avec des « volontaires », ainsi que l’U.R.S.S. par des moyens aériens ; cette puissante réaction ramène les forces alliées à la hauteur du 38ème où le front se stabilise après d’âpres combats.

Le 23 juin 1951, alors que le conflit se transformait en guerre de position, les délégués soviétiques à l’ONU proposèrent que les belligérants de Corée ouvrent des discussions afin de parvenir à un accord de cessez-le-feu. Le 10 juillet 1951, après des discussions préliminaires, des représentants des commandements de l’ONU et des forces communistes commencèrent les négociations de trêve à Kaesong, en Corée du Nord. Les discussions se poursuivirent par intermittence pendant deux ans. Le 27 juillet 1953, l’armistice fut signé à Panmunjom entre les représentants de l’ONU, ceux des volontaires chinois et de la Corée du Nord. Les discussions se poursuivent depuis pour un traité de paix et une réunification qui restent à réaliser.

La guerre de Corée, par l’ampleur des moyens matériels et humains mobilisés des deux côtés, par sa durée, par les risques d’embrasement auxquels elle exposa un monde coupé en deux blocs, constitua l’apogée de la guerre froide.

Cette « guerre oubliée », extrêmement meurtrière, où les civils furent deux fois plus nombreux que les militaires à trouver la mort, laissa le pays dévasté sans que soit modifiée la division antérieure de la Corée. Les pertes humaines (tués, disparus et blessés) étaient estimées à 4 millions. Environ 147 000 militaires sud-coréens furent tués et 210 000 blessés, tandis que les pertes militaires nord-coréennes étaient estimés à 300 000 morts et 220 000 blessés. Le nombre des victimes civiles dépasserait 2 millions de personnes. Les États-Unis comptèrent 157 530 victimes (33 629 morts, dont 23 300 au combat) ; les pertes des autres nations de l’ONU se montèrent à 16 532, dont 3 094 morts. Les pertes chinoises furent estimées à 900 000, dont 200 000 tués.. Le bataillon français perdit 287 tués et plus de 1.000 blessés.

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La journée nationale

Pour la première fois, le 8 juin 2005, partout en France, fut célébrée la journée nationale d’hommage aux morts pour la France en Indochine.

A Paris, la cérémonie officielle célébrée avec faste dans la Cour d’Honneur des Invalides, en présence de Madame ALLIOT – MARIE, Ministre de la Défense et de Monsieur HAMLAOUI MÉKACHÉRA, Ministre Délégué aux Anciens Combattants, a revêtu un caractère particulièrement émouvant avec l’hommage rendu à la dépouille d’un combattant qui vient d’être retrouvé au Vietnam et rapatrié sur la Métropole.

Voici les textes lus par Madame ALLlOT-MARIE, Ministre de la Défense et par M. Jean Marie ROUART, de l’Académie Française.

Hommage
de Madame Michèle Alliot-Marie
Ministre de la Défense

Il y a 51 ans, les armes se taisaient en Indochine.

Ce silence clôturait un siècle d’épopée française en Extrême-Orient.

Il mettait un terme douloureux à une guerre de huit ans commencée au lendemain de la cruelle occupation japonaise.

Loin de leurs foyers, sur des terrains inhospitaliers, face à un adversaire insaisissable, valeureux et sans cesse mieux armé, les combattants du corps expéditionnaire français ont lutté inlassablement, avec une foi, une ardeur, un courage et un dévouement qui forcent l’admiration et imposent le respect.

Leur sacrifice fut immense.
Leur tribut fut celui de la souffrance, du sang, et de la mort.

De 1945 à 1954, près de 100 000 soldats de l’Union française sont tombés en Indochine. Plus de 76 000 ont été blessés.

40 000 ont été fait prisonniers.
Parmi eux, 30 000 ne sont jamais revenus.
L’éclat de leur bravoure, le panache de leur engagement ne rencontreront trop souvent, en métropole, que l’indifférence ou l’hostilité de leurs concitoyens.

Tous ces combattants ont lutté, ont souffert, sont morts, avec, sans doute, le sentiment amer de l’abandon, la blessure ultime de l’ingratitude.

Ne les oublions pas.

Parachutistes, légionnaires, coloniaux, tirailleurs, métropolitains, gendarmes, marins, aviateurs, médecins et infirmières : ils venaient de France, d’Europe, d’Afrique du Nord ou d’Afrique noire.

Leurs frères d’armes vietnamiens se battaient pour leur terre, pour leur liberté, par fidélité.

Ils étaient jeunes.
Ils sont morts au détour d’une piste, dans la boue d’une rizière, dans un camp de prisonniers.

Aujourd’hui, pour la première fois, la Nation rend officiellement un hommage solennel à nos combattants d’Indochine.

La France n’oublie pas.

A cette occasion, nous nous recueillons devant la dépouille d’un de ces combattants.

Il est tombé là-bas, il y a plus de 50 ans, quelque part au bord de la NAM YOUN, dans la plaine de DIÊN BIÊN PHU, ultime théâtre de ce drame dont la grandeur nous dépasse.

A travers lui, c’est à l’ensemble de ses camarades que nous rendons hommage.

Que les combats de nos soldats en Indochine puissent rester gravés à jamais dans la mémoire du peuple français.

Leurs actions héroïques étaient l’aboutissement d’une certaine conception du monde, dont les principes ont pour nom liberté, justice et démocratie.

Aujourd’hui, dans ces pays, après de longues années de nouvelles souffrances, la guerre appartient désormais à l’Histoire.
De nouvelles pages de paix, de coopération et d’amitié ont été écrites et s’écriront encore.

Dans un monde incertain, où la paix n’est jamais acquise, que le souvenir des exploits de nos combattants, que la force des valeurs qu’ils ont illustrées, nous aident à rester debout, en hommes libres, vigilants et déterminés.

Honneur aux combattants d’Indochine !
Hommage
de Monsieur Jean-Marie Rouart
de L’Adadémie Française

Dans cet instant où nous évoquons la guerre d’Indochine, nous sommes étreints par un sentiment où il entre autant d’excitation que de tristesse. Notre cœur est partagé.

Excitation devant l’un des plus beaux exemples de courage des soldats français. Tristesse que ce courage ait rencontré tant d’indifférence, tant d’incompréhension de la part de la Nation. Cette guerre, qui a la force d’un terrible symbole, ranime le souvenir de tous les combattants de la guerre d’Indochine, quels que furent leurs armes, leur grade, qu’ils fussent membres du Corps expéditionnaire, légionnaires, supplétifs indochinois, Tabors marocains. Tous furent non seulement français par le sang versé, par la souffrance, par l’idéal, mais ils appartiennent désormais à une même fraternité. Tous mêlèrent leurs rêves, leur courage, leur sang sur la terre rouge du Tonkin ou dans les eaux boueuses des rizières de Cochinchine ou d’Annam.

A côté de ces grandes batailles perdues, comme Dien Bien Phu ou Cao-Bang, qui suscitèrent tant de héros galvanisés par l’énergie du désespoir, n’oublions pas les combats plus obscurs: eux aussi ont donné lieu à des actes lumineux de bravoure. Leurs noms exotiques, difficiles à prononcer, ne parlent plus qu’à de rares survivants. Ils nous dessinent tous une géographie du sacrifice: THAT-KHÉ, COC XA, HOA-BINH, TAY NINH, la Rivière noire, le Fleuve rouge, la Plaine des Joncs, les marais de CAM AU, la Route coloniale n°1, que les soldats appelaient« la rue sans joie », la RC4 qu’ils appelaient « la route de la mort », le col des ANANAS, celui de LUNG PHAI, si propice aux embuscades. N’oublions pas, plus anonymes encore, ces soldats de vingt ans qui défendaient, à 14000 kilomètres de leur patrie, les fortins accrochés à des pitons calcaires encerclés par la jungle. Sous un soleil sans pitié ou sous la pluie tiède des moussons, seuls avec leur idéal et leur drapeau. Ils montrèrent un héroïsme d’autant plus poignant qu’il fut sans témoin, sans mémoire.

La ferveur que nous inspire le souvenir des combattants d’Indochine, ce sont eux qui nous l’ont transmise. Ils nous ont communiqué leur enthousiasme juvénile. Cette guerre cruelle, cette guerre tragique, ils voulaient la voir comme une belle aventure, au service d’une mission, au service des valeurs universelles de la France.

Beaucoup avaient répondu à l’appel de l’exotisme, du risque, du romanesque. Ils cherchaient, loin de leur terre natale, un sens à leur vie. Ils éprouvaient de la tendresse pour ce pays si beau, si attachant, qui flattait dans leur imagination des rêveries adolescentes. Aussi ont-ils vécu d’une vie intense des moments d’exception même s’ils les payèrent au prix le plus fort, celui de la mort, de la souffrance, de l’humiliation.

Mais ce n’est pas ici, dans une enceinte éclairée par la gloire militaire, qu’on va apprendre que le métier des armes comporte toujours le risque du sacrifice. Il est la marque de l’honneur militaire, cette poésie grave du devoir, qui lui confère une valeur spirituelle.

Cette reconnaissance de leur sacrifice, nous la devons aux morts de la guerre d’Indochine qui nous donnent parfois l’impression d’être des soldats oubliés, des morts sans sépulture. Mais nous la devons aussi aux vivants: les mutilés, les déportés des camps, à ceux qui ont perdu leur sang ou qui sont restés blessés à jamais dans leur âme. Au-delà de la vicissitude des combats, des aléas de la guerre et de la politique, ces soldats malheureux ont illustré des valeurs éternelles. Face à un adversaire dont /a bravoure fut égale à la leur, ils ont remporté par leur courage une victoire mystérieuse: elle laisse derrière eux un sillage de lumière et des étoiles qui ne s’éteindront jamais.

L’Hommage National aux morts pour la France en Indochine est depuis régulièrement célébré le 8 juin de chaque année.

Voir dans CD le dossier «  la célébration du 8 juin 2006 et celle du 7 juin 2007 à l’Arc de Triomphe à Paris.

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D’un goulag à l’autre

Les soldats prisonniers du Vietminh qui étaient originaires des pays de l’Est, essentiellement des légionnaires, furent « rapatriés » dans leurs pays d’origine via la Chine et L’U.R.S.S. Ils furent très souvent condamnés dans leur propre patrie pour avoir combattu « un pays frère dans une armée colonialiste ».

Certains survécurent. Leur histoire est méconnue. C’est pourquoi nous avons voulu rendre hommage à ces hommes qui ont combattu pour la France et la liberté en citant un extrait de ce récit du légionnaire RAZVAN si bien raconté par le colonel H. CARRARD qui fut attaché militaire à l’ambassade de France à Bucarest (1) :

« Le vieux RAZVAN était fatigué. Il avait tant bourlingué, il avait tant vu de pays, il avait tant souffert. Il avait si souvent perdu l’espoir, mais il s’était accroché, il s’était battu contre les autres et contre lui-même et s’en était sorti à chaque fois. Cette nuit, dans ce train brinquebalant qui le conduisait de Tulcea à Bucarest, il était un peu anxieux.

C’était la première fois qu’il revenait dans la capitale depuis si longtemps, depuis le tout début de sa mise en résidence surveillée; il y avait bientôt trente ans, quand il avait dû régler des questions administratives interminables, à l’époque où il fallait des permis pour se déplacer, où il fallait rendre compte au secrétaire du Parti du village, au commissaire de police, à je ne sais qui encore. Hier soir il avait quitté son village sans rien dire à personne. Certes il en avait longuement débattu avec Oana, sa femme chérie, sa compagne des si mauvais jours, mais c’était resté dans la famille, on n’avait plus besoin de la permission de personne. La dictature était par terre depuis bientôt six mois, on revenait comme avant la guerre, quand il avait vingt ans, dans sa Transylvanie natale. « Anxieux mais déterminé. Il était anxieux tout de même, car il ne reconnaîtrait pas Bucarest, et puis où était l’ambassade de France dans cette grande ville ? Mais enfin il en avait vu d’autres, n’est-ce pas, et il se débrouillerait bien pour trouver ce petit coin de France, but de son voyage et espoir de… de quoi au fait ? Pourquoi allait-il dans cette ambassade dans laquelle il n’avait jamais mis les pieds ? Qu’espérait-il ? Il n’en savait trop rien, mais enfin il avait été soldat français pendant cinq ans, et même plus, si on comptait ses vingt-sept mois de détention dans les camps viêts. Alors peut-être que la France pouvait faire un petit quelque chose pour lui, pour un vieux serviteur qui s’était bien battu pour elle, et pas dans n’importe quelle unité, à la Légion étrangère, au 3e REI., 10e compagnie du lieutenant Bonfils. Tout cela tournait et retournait dans sa tête au rythme des ruptures de rails et des aiguillages qui le secouaient sur sa banquette défoncée de 3e classe.

Recherché par la police soviétique. Il se rappelait son départ à la guerre en 1941, la mobilisation, le peloton d’élèves gradés dont il était sorti sergent de l’armée royale roumaine, puis le passage du Prut sur l’ordre du général Antonescu pour reconquérir la Moldavie aux Soviétiques qui l’avaient envahie un an plus tôt. Au Dniestr, on avait continué, on s’était battu comme des diables contre ces Russes tant haïs et tant craints, mais là on était avec la grande armée allemande; alors le jeune RAZVAN y était allé de bon cœur, spécialement contre les partisans qui perturbaient les communications, tant et si bien que le K.G.B. avait mis sa tête à prix. Aussi, quand le sort des armes se fut inversé, que l’armée roumaine fut reconduite chez elle, que le roi Michel retourna son armée contre les Nazis et fit alliance avec les Occidentaux et par conséquent avec l’ennemi d’hier, un certain nombre de soldats roumains, dont RAZVAN, qui s’étaient un peu trop fait remarquer par leur combativité, se trouvèrent recherchés par la police soviétique.

Il réussit malgré tout à passer entre les mailles, refit la guerre contre les Allemands et se retrouva à Vienne où cela devint de plus en plus difficile d’échapper aux recherches de la police soviétique. Que faire ? Revenir au pays alors que l’armée Rouge l’occupait et y établissait un régime communiste particulièrement dur et sans pitié ? RAZVAN n’en avait nulle envie. Aussi après deux ans et demi d’errance, se précipita-t-il sans hésitation dans un bureau d’engagement de la Légion étrangère française qu’il avait repéré quelque temps auparavant. Son engagement définitif datait du 28 février 1948, il s’en souvenait bien, il venait d’avoir vingt-huit ans et il était déjà un vieux soldat.

Engagé dans la légion pour l’Indochine. Il se remémorait ses classes en Algérie, à Sidi Bel Abbès, ses copains, dont beaucoup avaient disparu plus tard en Indochine, son embarquement sur le Pasteur à Mers El-Kebir au début du mois de septembre 1948.

Tout cela était bien loin, il était jeune et partait pour l’aventure, pour l’Orient. On allait simplement rétablir l’ordre dans une contrée exotique. Jamais il n’aurait pu penser qu’il souffrirait mille fois plus que ce qu’il avait vécu sur le front russe.

Et cette arrivée à Saigon, suivie du débarquement à Pointe Pagode, c’était le 25 septembre, il s’en souvenait nettement car le lendemain il avait été affecté à la 12e Cie du 3e REI, c’était un souvenir très précis. Il allait y rester jusqu’à ce que le troisième bataillon soit envoyé à Cao Bang en 1950. Cao Bang, horrible souvenir! Non pas la ville, mais son évacuation à laquelle il n’aurait jamais dû participer. En effet, début septembre 1950, il avait demandé une prolongation de séjour de six mois, alors qu’il était rapatriable et devait embarquer sur le Pasteur dans les premiers jours d’octobre. Il avait pris cette décision comme cela, un jour, pour rester avec les copains.

Cao Bang, on y était pourtant bien, la forteresse paraissait solide, et puis un jour, brusquement, sans préavis, en avant, direction Lang Son et au passage on devait secourir les copains du IIIe, assiégés à Dong Khé. Quel souvenir, cette marche à travers la jungle avec cette colonne invraisemblable de partisans, de femmes et d’enfants qui avaient disparu progressivement et ces combats contre une marée de Viêts. Au bout d’une semaine de marche et de bagarres, dans un terrain épouvantable où il avait fallu porter les copains blessés, à peine le temps de recouvrir les morts, à bout de munitions, exténué, il avait été fait prisonnier avec les restes de la compagnie du lieutenant Bonfils.

Prisonnier pendant vingt-sept mois, puis libéré vers son pays d’origine. Vingt-sept mois, il était resté prisonnier dans les camps viêt-minh; vingt-sept mois à marcher, vingt-sept mois d’humiliation, séparé des officiers et des sous-officiers, mais il avait tenu malgré la maladie et les privations. Enfin, début 1953, il avait été libéré avec d’autres camarades des pays communistes, pour leur malheur pas vers la France, mais chacun vers son pays d’origine. RAZVAN était donc parti avec ses compagnons d’infortune vers la Chine par divers moyens de transport, camions molotova, train, à pied bien sûr, jusqu’à une première étape à Pékin. Là, il avait essayé de prendre contact avec l’ambassadeur de Roumanie qui dans un premier temps l’avait écouté, puis, après avoir reçu des consignes, l’avait encouragé à rentrer au pays.

Sibérie, Russie et finalement Roumanie, quel souvenir épouvantable que cette arrivée dans son pays natal, dans sa patrie. Immédiatement il avait été interné, puis jugé pour trahison à la grande cause du socialisme, c’était en 1954. Le jugement avait été sans appel, dix ans de prison. Le style de l’administration française avait quelque chose de fantastique et de cocasse. On peut en effet lire sur les états de service de RAZVAN: “Prisonnier, rapatrié par la voie démocratique, ne s’est pas présenté aux autorités françaises lors de son rapatriement dans son pays d’origine” !

    Mis en prison, puis isolé en cellule. Il s’était retrouvé dans la plus sinistre des prisons, à Pitesti, la prison des expériences de rééducation. Par chance la grande période des tortures était passée, mais tout de même ce ne fut pas facile. Un jour, excédé par un gardien, il lui avait mis son poing dans la figure, résultat, deux ans de cellule sans voir personne, même pas les gardiens. C’est un petit oiseau qui l’avait aidé à survivre. Il venait tous les jours, à l’heure où on servait au reclus sa maigre pitance. Il lui donnait quelques miettes. Cette conversation quotidienne de quelques minutes à travers le soupirail avec ce petit moineau lui redonna l’espoir.

Mis en résidence surveillée, marié et père d’un enfant. En 1964 ou 1965, au moment de l’amnistie, il avait été libéré et mis en résidence surveillée quelque part du côté du delta du Danube, encore pour dix ans. Mais là, il avait trouvé Oana qui elle aussi avait eu des malheurs. Elle avait perdu son mari dans le camp de travail du canal Danube-Mer Noire. Ils avaient uni leur misère, s’étaient mariés et avaient eu un fils. Petit à petit, ils avaient acheté quelques outils, travaillé leur lopin de terre, mangé à leur faim, amélioré leur cabanon pour en faire une vraie petite maison et se refaire une vie après tant et tant de souffrances.

Et l’on était arrivé ainsi en 1989 et à la révolution qui avait abattu le tyran et sa dictature. C’est ainsi que RAZVAN se retrouvait dans ce train vers Bucarest. Ses pensées tournaient et retournaient. Comment arriver à l’ambassade de France ? Comment y entrer ? À qui s’adresser ? Les miliciens en poste devant la porte le laisseraient ils passer ?

Reçu à l’ambassade de France. En fait tout alla bien, il se présenta devant un parlophone et demanda à voir l’attaché militaire. L’idée lui en vint au dernier moment. Le colonel arriva assez rapidement. Il lui raconta son histoire. Ce fut assez long car il avait oublié son français, mais cela lui revint petit à petit. Il faisait bon dans ce bureau, le colonel l’écoutait avec attention et même lui semblait-il avec stupéfaction et admiration. Il se sentait tout ragaillardi. Son cœur se réchauffa de revoir ainsi, plus de quarante ans après, un officier français qui le recevait avec tant de chaleur et cet officier était un colonel. Il ne se souvenait pas d’avoir parlé à un colonel, même dans l’armée française. Au bout d’un bon moment, peut-être deux heures, le colonel le fit conduire au consulat où un fonctionnaire français releva tous les éléments d’identité possibles et lui demanda de repasser dans deux mois… »

Il avait servi la France avec honneur et fidélité et la France lui rendit cet honneur en le pensionnant et en lui remettant la Croix du combattant volontaire qu’il portait fièrement.

(1) Nous remercions le colonel Carrard, Amédée Thévenet et les éditions France Empire qui nous ont autorisé à reproduire ici ce texte qui peut aussi être retrouvé dans l’ouvrage d’Amédée Thévenet « LA GUERRE D’INDOCHINE racontée par ceux qui l’ont vécu », édition France Empire

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Les chiffres

Si l’on excepte la communauté civile de VINH, qui resta captive pendant presque toute la guerre d’Indochine dans l’indifférence la plus complète du gouvernement français, jusqu’au désastre de CAO BANG, rares furent les prisonniers français. Très peu de ceux qui furent capturés avant cette époque survécurent au traitement qui leur fut infligé. Les massacres de prisonniers, entre 1946 et 1950, les corps mutilés et déchiquetés font alors partie d’une panoplie de moyens au service de la stratégie de l’époque pour saper le moral des Français. Cette méthode du meurtre organisé se perpétra au-delà de 1950 pour les Vietnamiens que le Viet-Minh considérait comme nuisibles à sa cause .

Au Nord Viet-Nam, à partir d’octobre 1950, le Viêt-Minh, placé brusquement à la tête d’un contingent de trois mille prisonniers, organise un système de camps les regroupant selon leurs grades, leurs nationalités et l’intérêt qu’il entend en tirer en matière de propagande à court, moyen ou long terme. Parallèlement, l’état major Viet-Minh peaufine avec l’aide de partis communistes frères la mise au point des techniques de leur utilisation.

Au Sud Viet-Nam, les otages militaires et civils étaient peu nombreux. Ils furent dispersés au grés des opérations de guérilla dans les zones administratives viets du Nambo sans qu’un véritable regroupement ait jamais été réalisé.

Au Cambodge et au Laos, les cas de capture de civils ou de militaires français furent rarissimes et le problème, en conséquence, n’était pas traité.

On cite généralement le chiffre de 40000 prisonniers du Vietminh pour le conflit indochinois qui dura de 1945 à 1954. A la fin des hostilités, deux documents sur le nombre des prisonniers de guerre du Corps Expéditionnaire Français en Extrême Orient dans les camps Viêt-Minh de 1945 à 1954 furent établis :

l’un est un rapport du Médecin Commandant Martin d’octobre 1954
l’autre est une note n° 1929/EM CEC/MDL du 8 juillet 1955.

1° Situation établie par le Médecin commandant Martin

Disparus et présumés prisonniers à la date du 20 octobre 1954 (Depuis 1945) Libérés entre le 14 juillet 1954 et le 20 octobre 1954, faisant l’objet du présent rapport
Français 6449 2587
Légion Etrangère 6328 2567
Nord-Africains 6695 3369
Africains 1748 796
Autochtones 15759 1435
Total 36979 10754

2° Note n°1929/EMCEC/MDL du 8 juillet 1955

Français Légion Etrangère Nord-Africains Africains Total Autochtones Total général
PG et disparus
au 30 juillet 1954
6449 6329 6695 1774 21247 15859 37106
Personnels libérés fin 1954 2591 2570 3370 796 9327 1648 10975
Jugements de décès intervenus depuis 1954 985 481 146 22 1634 388 2022
Situation des manquants au
1er juin 1959
1982 2494 1679 283 6438 12927 19365

Ces chiffres relatifs au nombre de prisonniers et à celui des libérés, qui ne diffèrent que de quelques unités, sont fiables et ils ont été repris dans la thèse pour le Doctorat d’Université soutenue par le Colonel (er) Robert BONNAFOUS devant le Centre d’Histoire militaire et d’Etude de la Défense Nationale.

Aucun rapport officiel n’a été établi concernant les prisonniers civils. Ils auraient été de 2894 à 3021. En incluant les autochtones, ce chiffre se situe probablement bien au-dessous de la réalité. Combien furent libérés ? Probablement très peu.

Dans les premiers mois de l’année 1950, le Parti Communiste français, devenu une véritable base arrière du Vietminh, se déchaîna contre la guerre d’Indochine. L’un de ses responsables, Léo FIGUERES, membre du Comité Central et Secrétaire Général de l’Union de la Jeunesse Républicaine de France, arrive au Viet Bac. Il rencontre les dirigeants de la RDV (République Démocratique du Viet-Nam). HÔ CHI MINH, interrogé sur le sort des civils et des prisonniers de guerre internés sur son territoire, lui répond : “Nous faisons tout notre possible pour améliorer leurs conditions de vie. Ils sont mieux nourris que nous. J’ai reçu d’eux pas mal de témoignages de gratitude.” Cette réponse est publiée dans le journal “L’Humanité dimanche” du 22 octobre 1950. Le même HÔ CHI MINH lui suggère que des échanges de prisonniers soient l’occasion de contacts préliminaires qui ouvriraient la voie à des pourparlers politiques. Sur place, Léo FIGUERES obtient la libération de 52 otages français, dont des vieillards et des enfants pris à HONGAY, contre l’élargissement de centaines de prisonniers vietminh.

Ainsi voit-on poindre la stratégie vietminh vis-à-vis des prisonniers français : dans un but de propagande, on laisse partir, après les avoir endoctrinés, de petits contingents qui portent des noms pompeux comme celui de “combattants de la paix”.

Parallèlement, après octobre 1950, les cadres de l’armée française regroupés dans le camp N°1 sont amenés, à la suite de plusieurs mois d’un subtil lavage de cerveau sur des corps affaiblis, à signer un manifeste dénonçant la « sale guerre d’Indochine ».

Pour le Parti Communiste Français qui avait choisi nettement son camp, celui du Vietminh, le séjour de FIGUERES aboutit à l’envoi, sur demande des Viets, de deux militants français pour représenter le PCF auprès de la RDV : une délégation en quelque sorte. Les deux “Camarades coopérants” arrivent en Indochine en janvier 1951. Leur mission sera de conseiller le Viet-Minh sur les thèmes de propagande à développer à l’adresse des prisonniers de guerre du CEFEO. Ils seront aidés en cela par des conseillers d’autres Partis Communistes nationaux car l’Europe, par la Légion Etrangère, et tous les pays de l’Empire français se battent en Indochine.

Les prisonniers du Viet Minh devenus des matériaux de propagande, devaient, selon les lieux, les époques et les circonstances, servir ou mourir. Ce système savamment mis en place se traduit par une effroyable hécatombe. Quelques chiffres traduisent dans leur brutalité l’horreur à laquelle on était parvenu. Le taux moyen de mortalité dans les camps vietminh de 1946 à 1954 fut de plus de 60 %. Lorsque l’on rentre dans le détail, les constatations sont parfois ahurissantes. Sur les mille neuf cents prisonniers des camps 2, 4 et 5 qui furent capturés sur la RC 4 entre septembre et octobre 1950, seulement trente-deux survivants regagnèrent le camp N° 1 en août 1952. Le taux de mortalité fut donc de plus de 90%. Il s’agit dès lors ici d’extermination rapide.

Un peu plus de dix mille hommes furent faits prisonniers à Dien Bien Phû. Après de très durs combats, le commandement vietminh organisa pour eux une “marche de la mort” pour regagner les camps. En quatre mois de captivité, le taux de mortalité fut de plus de 70%. N’oublions pas que ce mépris de la vie humaine conduisit à la fin de la deuxième guerre mondiale les officiers japonais responsables de la marche de la mort des Philippines à la condamnation pour crime de guerre et à la pendaison.

Pendant toute la guerre d’Indochine, la Croix-Rouge ne reçut jamais l’autorisation de visiter les camps et les médecins prisonniers furent, sauf de très rares exceptions, interdits de pratique, et regroupés au camp des officiers.

Les prisonniers libérés revenaient épuisés, dans un état squelettique. La plupart durent être hospitalisés et leur vision évoquait celle des retours des camps de concentration.

Plus de 35 années se sont écoulées entre la libération des camps et le vote de la loi 89-1013 du 31 décembre 1989. Beaucoup d’anciens prisonniers sont morts au cours de cette longue période et dans leur très grande majorité, les survivants, pour ne pas dire la totalité, ont demandé à bénéficier du statut de Prisonnier du Vietminh (PVM) créé par cette loi.

La Commission nationale d’attribution du titre de PVM, présidée par le Directeur des Statuts, des pensions et de la réinsertion sociale du ministère des Anciens combattants a attribué, du 17 décembre 1990 à ce jour 2975 cartes reconnaissant le statut de prisonnier du Vietminh.

Parmi les bénéficiaires de celles-ci, 600 adhérents de l’ANAPI sont décédés.

Dans l’ignorance du nombre de bénéficiaires non adhérents à notre association qui ont pu également disparaître depuis l’attribution de leur carte, on peut estimer que le nombre maximum des survivants de cette tragédie n’excède pas 2000 à ce jour.

Taux de mortalité dans différents camps de prisonniers

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État des prisonniers

Tuer les prisonniers sans avoir à les brutaliser : telle était en général la manière d’agir du Viet-Minh, non seulement envers les soldats français du Corps Expéditionnaire Français en Extrême-Orient (CEFEO) mais aussi envers tous ceux, hommes ou femmes, vieillards ou enfants, militaires ou civils, étrangers ou nationaux, qui n’acceptaient pas le communisme apporté avec lui.

La famine organisée a été souvent le moyen employé, moins « voyant » que des exécutions sommaires, comme le firent souvent les occupants japonais, mais pouvant se révéler tout aussi efficace.

Notre corps est en constant remaniement. Pour ce faire, il a besoin que lui soient apportées les « briques » qu’il utilise. Cet apport se fait habituellement par l’alimentation. Quand un être humain est mis « à la diète », il perd du poids. Nous avons quasiment tous essayé de le faire, le plus souvent pour des motifs esthétiques.

II n’en est plus de même quand la ration alimentaire journalière est systématiquement abaissée et carencée. Notre corps commence par utiliser les graisses disséminées un peu partout en nous. Quand celles-ci ont totalement disparu, il va attaquer d’autres de nos constituants de base.

Les muscles. Ces derniers contiennent non seulement des graisses mais aussi des substances appelées protéines (ou protides) que nous trouvons d’habitude dans les mets d’origine animale et parfois aussi, mais différents des précédents et en moindre quantité, dans les produits végétaux. L’amaigrissement, qui en est la conséquence directe, peut être très rapide.

II est cependant des éléments dont nous ne pouvons pas nous passer et que nous ne savons pas synthétiser. II s’agit de certains « acides aminés », protéines spéciales d’origine uniquement alimentaire, animale et végétale, et de substances plus ou moins complexes, les vitamines. Le manque de ces dernières amènent l’apparition de maladies bien connues, telles que le scorbut, le rachitisme ou le béribéri, pour n’en citer que trois.

Les prisonniers du Viet-Minh ne recevaient souvent, et dans la plupart des cas, que du riz, à L’exclusion de tout autre mets. Ce riz est essentiellement composé d’amidon, un sucre, que la cuisson permet de digérer lentement. Mais rien d’autre.

Si les réserves corporelles d’un individu sont assez abondantes, la perte de poids qui survient immanquablement avec un tel régime, sera rapide mais pas toujours spectaculaire. Il n’en est pas de même si le prisonnier a subi avant sa capture, des conditions dures, alimenté plus ou moins régulièrement du fait des combats, ceux-ci apportant en plus un « stress » débilitant par lui-même.

Les prisonniers faits à Diên Biên Phú ont eu, parmi eux, une mortalité élevée car ils réunissaient souvent ces pré conditions. Le régime qui fut le leur ensuite, ajouté aux marches épuisantes, a conduit à ces apparences d’êtres humains, cachectiques, pouvant à peine se tenir debout. Beaucoup avaient dépassé le « point de non-retour ». Tous les traitements, y compris la reprise d’une alimentation équilibrée ou supplémentée, ne pouvait leur permettre de récupérer, quel que soit le temps mis à le faire. Ils décédaient avant.

L’absence de tout traitement des maladies qui atteignaient, un jour ou l’autre les prisonniers du fait de leur résistance amoindrie aux infections, ajoutée aux multiples agressions par divers parasites ou insectes, diminuait encore les possibilités de lutte de nos corps. Les blessures dues aux morsures de très nombreuses sangsues, conduisait inévitablement à une anémie importante, les éléments constitutifs du sang qu’elles nous prenaient, n’existant plus. Les diarrhées dues aux amibes nous ôtaient des sels minéraux, eux aussi indispensables et non renouvelés. Sans parler des diverses parasitoses que l’impossibilité de se laver correctement faisait se développer, poux, ascaris, ankylostomes etc…
Un autre facteur d’atteinte à la personnalité de chacun avait été ajouté par les geôliers. Forts des enseignements soviétiques et chinois, ils infligèrent à leurs victimes sans défense des manoeuvres qui devaient, dans leur esprit, aboutir à leur complet « retournement » politique : des “cours”, imposés souvent chaque soir, alors que tous n’aspiraient qu’à prendre enfin un peu de repos.

Les outrances de leurs discours, leur fausseté souvent, empêchaient qu’elles nous atteignent. Mais étaient plus dangereuses les auto-accusations de méfaits, réels mais le plus souvent imaginaires, dont le « peuple » avait été victime de la part du « coupable ». Le raffinement était que ce «  coupable  » devait parfois dire quelle devait être sa « punition », que seule la mansuétude de «  l’oncle Ho  » pouvait lui éviter, chantage cynique mais constant. Enfin, pour éviter une entraide toujours possible entre prisonniers, la délation avait été élevée au niveau d’une institution. Malheur à celui qui ne dénonçait pas un camarade, quelle que soit la vétille dénoncée. Il risquait autant que l’auteur du «  crime  »

Résister à tout cela était épuisant, dangereux, augmentait encore les risques d’en subir les conséquences néfastes. Pourtant, nous avons pu quand même nous épauler, nous aider à subir ces contraintes. Les traces laissées en nous, qui avons survécu, sont ineffaçables. Nous aurions pu espérer qu’à notre libération, les conditions inhumaines de notre captivité étant connues, des psychiatres ou des psychologues viendraient nous aider à reprendre pied dans notre milieu sans trop de dégâts. A la place, nous avons eu droit à des interrogatoires par la Sécurité Militaire, nous stressant encore davantage. Nous n’avions pourtant pas besoin de ce surplus de défiance manifeste.

 

Tableau récapitulatif nosologique
de la morbidité des prisonniers de guerre libérés

Français Légion étrangère Nord-Africains Africains Indochinois Civils Total
Non classés 62 83 137 12 22 2 318
Bon état 139 148 148 21 60 516
Maladies infectieuses 17 16 18 1 52
Ictères 19 5 4 1 29
Tuberculose 10 14 21 45
Troubles mentaux 4 4 1 1 10
Cachexies 75 72 31 1 179
Paludisme 251 330 516 5 31 1133
Amabiase et troubles digestifs 351 517 448 39 12 1367
Amabiase hépatique 8 5 4 1 18
Troubles nutritionnels et oedèmes 118 128 48 2 206
Autres carences 8 8 5 31
TOTAL 1062 1330 1381 81 128 2 3984
Chirurgicaux légers 76
4060

Les photos et les chiffres contenus dans ces pages proviennent des Archives de Vincennes et figurent dans la thèse du colonel Robert Bonnafous sous le titre “Les prisonniers du corps expéditionnaire français en Extrême-Orient dans les camps Viêt Minh (1945-1954)”.

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Environnement administratif des libérés

Les prisonniers libérés reçurent une avance de solde sur les arriérés de solde bloqués pendant leur séjour ( sur ces arriérés il sera retenu la prime d’alimentation correspondant au temps de captivité ! ).

Ils percevront une autre avance à leur arrivée après rapatriement, puis ils sont oubliés. Il faut attendre l’intervention à la chambre des députés de Roger MOREVE, député de l’Indre, pour que le gouvernement prenne les mesures nécessaires au paiement de ce qui est dû.

Les libérés perçoivent un petit paquetage, mais beaucoup piochent dans leurs avances pour acheter vêtements civils ou équipements de fantaisie à la grande satisfaction des commerçants locaux. La reconstitution de leurs pièces militaires ou civiles détenues au moment de la capture est entreprise.

Rapatriement

D’une façon générale les prisonniers à rapatrier sur la métropole, l’Afrique du Nord ou d’autres territoires comme Madagascar ou Pondichéry furent rassemblés à Saïgon en vue de leur rapatriement et leur régularisation administrative définitive. Quelques uns ont été volontaires pour terminer leur temps réglementaire de séjour en Indochine.

Ils ont été répartis dans différents points d’hébergement suivant leurs grades ou leurs affinités ou leurs origines pour les soldats venant des autres territoires de l’Union Française que la Métropole. Certains ont connu encore un séjour hospitalier.

Les embarquements se font à la discrétion du commandement pour les hommes du rang et les sous-officiers, pratiquement exclusivement par mer sauf pour des évacuations sanitaires d’urgence avec emploi de la voie aérienne.

Il convient de noter que dans un élan de fraternité dans la lutte contre le communisme les Etats-Unis offriront à des blessés de Dien-Bien-Phu un rapatriement par leur territoire où certains connurent un séjour paradisiaque en Californie. Ce privilège fut aussi accordé à quelques officiers.

Les officiers peuvent , en général, choisir leur mode de rapatriement, beaucoup choisissent le retour par bateaux pensant ainsi augmenter leur temps de convalescence et être dans la meilleure forme au pieds des passerelles de débarquement. Pour ceux qui choisissent la voie des airs, l’Inde interdisant le survol de son territoire à des militaires français (alors qu’elle vend des fournitures au corps expéditionnaire), il est nécessaire d’établir des passeports civils, qui devront être rendus à l’arrivée en métropole.

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