La présence japonaise en Indochine

Guerre 1939 – 1945 et présence japonaise en Indochine
Le Japon était en guerre larvée contre la Chine dès le début des années 1930 (Affaire du Mandchoukouo, occupation du Tsien-Tsin, etc…). En 1939, une bonne partie de la zone côtière chinoise était occupée par l’armée nippone.

La France, à travers le TONKIN, acheminait au profit des Chinois des vivres, des carburants et des matériels du port de Haïphong jusqu’à Yunnanfou par le chemin de fer Haïphong – Hanoï à Yunnanfou.

C’est une pièce qui se joue entre le Japon et la France en cinq actes.

Acte 1 :

Tout a débuté le lendemain de l’armistice demandé par la France à l’Allemagne nazie.

Le Japon profitant de la situation de faiblesse de la France exige la fermeture de la frontière sino- indochinoise et le contrôle de ces frontières par une commission nippone. Cet ultimatum est transmis par l’Ambassadeur de France à Tokyo au Gouverneur Général de l’Indochine, le général CATROUX, le 19 juin 1940. Celui-ci s’incline sachant qu’il est impossible de résister à une attaque japonaise avec nos faibles moyens sur ce territoire, d’autant plus qu’il ne peut espérer aucune aide extérieure, ni de la Métropole ni des Britanniques, ni des Etats-Unis traditionnellement anti-colonialiste et voulant rester neutres dans cette région.

Le tout nouveau gouvernement de VICHY, désavouant CATROUX, le remplace par l’Amiral DECOUX qui prend ses fonctions le 25 Juillet 1940.
Acte 2 :

Tokyo intensifie ses actions et remet un autre ultimatum à l’Ambassadeur français en août 1940

Cette fois-ci, l’affaire se règle au niveau des gouvernements et l’accord Arsène Henry – Matsouka est signé le 30 août 1040. Il impose à la France le stationnement des troupes nippones au nord du Fleuve Rouge, et l’utilisation de certains ports et aérodromes.

Le Gouvernement de Vichy laisse à DECOUX le soin de négocier les modalités d’application, négociations difficiles et très âpres.

Cet accord d’application est signé in extremis le 22 septembre 1940. Et le même jour, les troupes japonaises de Canton envahissent le nord du TONKIN, passent la frontière à DONGDANG et investissent LANGSON. Nos troupes battent en retraite, abandonnant LANGSON avec des centaines de morts et des prisonniers. Il a fallu un ordre express de l’Empereur du japon pour que l’armée nippone retourne en territoire chinois en libérant les prisonniers.

Nos troupes montrent leur faiblesse (vétusté des équipements et des matériels, médiocre combativité des troupes autochtones). Cette faiblesse est constatée une seconde fois dans l’affaire du SIAM.
Des revers français sur terre au Cambodge en janvier 1941 sont compensés par l’éclatante victoire navale française près de l’île de KOH-CHANG sur la flotte siamoise.
Le Japon impose sa médiation et un traité est signé sous la contrainte avec le SIAM à Tokyo en mai 1941, amputant le Cambodge de près de 2 provinces et le Laos de 2 zones à l’ouest du Mékong.

Les incidents de LANGSON et du SIAM montrent l’isolement de l’INDOCHINE. Ni la Grande-Bretagne, ni les Etats-Unis n’ont voulu intervenir diplomatiquement.

Le Japon, dès le 27 septembre 1940, a signé une alliance Tripartite avec l’Allemagne d’Hitler et l’Italie de Mussolini.

Et, le 13 avril 1941, Matsuouka signe à Moscou un pacte de non agression avec Staline.
Acte 3 :

Il se joue à Vichy. L’Ambassadeur du Japon KATO présente au Gouvernement de Vichy des demandes tendant à permettre l’accès des forces nippones dans toutes les régions d’Indochine. Comme auparavant pour les précédents actes, le Japon reconnaît la souveraineté française en Indochine et respecte l’intégrité du territoire de la Fédération.

Il y a cependant une nouveauté, celle de la « défense commune» de l’Indochine contre toute agression venant de l‘extérieur.

L’accord KATO-DARLAN est signé le 21 juillet 1941 à Vichy. Les négociations pour son application sont laissées à l’initiative de DECOUX. Celui-ci fait traîner les choses jusqu’en décembre 1941.
Acte 4 :

Au lendemain de l’attaque de Pearl Harbour, les Japonais présentent encore un ultimatum à DECOUX demandant l’application sans délai et sans restriction de l’accord Cato-Darlant, sinon le Japon assurera lui-même le contrôle total du territoire indochinois.

L’Amiral DECOUX obtient des Japonais la répartition des zones de défense. La surveillance de la frontière chinoise est confiée aux Français (on sait que la Chine n’a aucune intention d’envahir l’Indochine). Toutes les côtes sont confiées à la défense japonaise contre les possibles débarquements américains ou britanniques.

L’Amiral DECOUX pouvait-il prendre une attitude totalement négative et repousser les exigences nippones au cours du mois de décembre 1941?
« C’était la solution de facilité, écrit Georges GANTIER, celle qui aurait permis de se tailler une réputation de résistant avant la lettre, sur les ruines de la souveraineté française ». Il faudrait ajouter « sur les horribles souffrances et sur les tombes de la plupart des 40000 français présents en Indochine, qu’ils soient militaires ou civils ».

Le Général de Gaulle a déclaré la guerre au Japon dès le lendemain du coup de Pearl Harbour, le 9 décembre 1941.
Acte 5 :

On peut parler d’infléchissement de la politique de DECOUX dés 1943 et des essais souvent infructueux du rapprochement de GAULLE – DECOUX. Mais, il faut également mentionner les dissensions et les rivalités entre les résistants civils et les résistants militaires, mal conçues et organisées par le Général MORDANT.

Conseiller par Monsieur de BOISAUGER, DECOUX envoie un certain Monsieur François à Alger pour prendre contact avec de GAULLE. Ce dernier envoie de LANGLADE en Indochine, porteur d’un message à DECOUX. Cette missive a été modifiée par LANGLADE lui-même qui ne l’a pas remise à DECOUX. Il avait en effet rencontré le Général MORDANT, qui le dissuade de voir le Gouverneur Général et le convainc que l’ennemi N° 1, bien avant les Japonais, s’appelle DECOUX.

MORDANT est nommé Chef de la Résistance en Indochine et délégué au Comité Français de Libération Nationale (C.F.L.N.) Ce choix est loin d’être judicieux, il est qualifié par certains historiens de catastrophique. Résistance mal pensée, mal organisée sur le modèle métropolitain, dans un environnement et un contexte tout à fait différents.

Les Résistants de MORDANT croient fermement à un débarquement allié en Indochine, information fréquemment diffusée par les radios de New-Delhi et de Calcutta ; les Japonais eux-mêmes y croient. On sait aujourd’hui qu’aucun débarquement n’a été prévu dans les plans Américains.

Le Président ROOSVELT l’a explicitement dit le 1er janvier 1945 «  Je ne ferai rien pour libérer l’Indochine de l’emprise japonaise  ».

Le 23 Février 1945, deux semaines avant le coup de force, l’Amiral DECOUX envoie un message au ministre des Colonies. « Le manque de pondération de l’organisation de la Résistance me gêne énormément. L’éviction des troupes japonaises n’est plus qu’une question de temps. Notre intérêt est que des initiatives prématurées ne provoquent pas un coup de force des Japonais, pouvant tout remettre en cause ».

Message transmis mais mal entendu par le Gouvernement à Paris en 1945 et le 9 mars 1945, le drame arrive.

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